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Queen Eteme, chanteuse: « Une grâce incroyable d’avoir travaillé avec Manu »

L’histoire musicale de Queen Eteme est quasiment indissociable de celle de Manu Dibango. Comment décririez-vous cette relation si particulière ?

Cette relation, elle est paternelle au départ. Manu, ce n’est pas seulement mon père spirituel, c’est le père de tout un continent, dans toute sa dimension : sur le plan artistique, sa sagesse, le poids de l’âge, son expérience…

J’ai eu la chance de travailler avec lui. Toutes ces années passées à ses côtés m’ont beaucoup servi dans ma carrière et me servent jusqu’aujourd’hui, et au-delà je dirais, qu’il est resté un modèle qui a continué d’exercer ce métier malgré toutes les difficultés qu’il présente.

Il n’a jamais fléchi face à tous les obstacles. C’est une grâce incroyable d’avoir travaillé avec lui. Nous prions pour que Dieu nous accorde la possibilité de faire ce métier aussi longtemps que lui.

Abidjan, où vous vivez à présent depuis quelques années, est le siège du Marché des arts du spectacle. Quel rapport avez-vous avec le MASA ?

Mon histoire avec le MASA est celle que tout artiste peut avoir avec cette plateforme qui promeut les artistes, et qui donne un rayonnement à notre continent.

Le MASA je l’ai connu quand j’étais encore à Paris. Et en tant qu’artiste musicienne, j’étais très intéressée par la programmation et toutes les articulations, surtout cette mutualisation des talents et des expériences qui est vraiment vitale aujourd’hui, afin que des artistes puissent exercer ce métier avec aisance.

Au fil des années, j’ai vu les éditions passer. En 2016, j’ai pu être aux côtés de mon papa Manu Di-bango, parce que c’était le parrain du MASA. Puis il y a eu un autre parrain, Ray Lema. En 2020, j’ai constaté qu’ils ont eu des innovations.

J’ai par exemple participé à des échanges avec un panel très intéressant qui a mis le doigt sur des problématiques qui minent ce métier, comme la mobilité des artistes, leur circulation libre à travers le continent et leur mise en réseau.

Justement, en ce qui vous concerne, comment vos voyages et expériences autour du monde ont-ils nourri votre travail ?

Je vais un peu partout où la musique m’appelle. C’est vrai, j’ai vécu pendant très longtemps à Paris, et après j’ai dû rentrer en Afrique, parce que j’ai constaté qu’il y avait beaucoup de besoin, ne serait-ce qu’au niveau de la jeune génération des artistes émergents.

Il fallait que je vienne mettre mon expérience au service des jeunes générations et même de mes pairs. Créer également des collaborations que je ne pouvais pas créer quand j’étais en Europe. Au fil des ans, je me rends compte que je vais d’un pays à un autre, à cause de projets qui m’appellent. Avant cela j’ai vécu au Bénin, puis j’ai été appelée en Guinée, au Gabon pour aller soutenir Annie-Flore Batchiellilys, pour son festival « Les nuits atypiques de Mi-ghoma ». En somme, je vais partout où je peux être utile à notre continent.

Vous chantez en diverses langues et exercez votre métier d’artiste dans plusieurs pays. Quel plus cette diversité ap-porte-t-elle à votre art ?

Cette diversité présente dans mes œuvres musicales permet de m’enrichir, et me donne une plateforme pour mettre en valeur toutes les langues que j’ai l’opportunité de côtoyer et d’apprendre. Ensuite, il y a les cultures des uns et des autres que j’adopte, comme les habitudes culinaires et vestimentaires.

Ici par exemple en Côte d’ivoire, j’aime bien porter le pagne Baoulé, le pagne Ya-couba. Chaque fois que je vais dans un pays, j’essaye d’aller un peu plus en profondeur dans ma connaissance des langues, des instruments, entre autres.

C’est pourquoi il n’est pas étonnant de me voir surfer de la musique Bantou à la musique mandingue. J’ai eu la chance de collaborer avec des aînés, des maîtres comme le Guinéen Papa Kouyaté, un grand percussionniste qui a travaillé pendant plus de 32 ans avec Miriam Makeba.

Parlant de percussions, en ce moment je travaille également avec le Camerounais Armand Biyag, qui apporte sa fraîcheur au niveau des arrangements vocaux et musicaux.

Comment vous retrouvez-vous à vivre et à travailler en Côte d’ivoire ?

En 2013, je suis venue à Abidjan sur invitation d’un producteur qui avait pour ambition de mettre en commun toutes les chanteuses de la « génération Houphouët-Boigny » sur un projet qui s’appelait « Fils d’Afrique ».

La Côte d’ivoire venait de traverser deux crises politiques importantes, et il voulait mettre à contribution les voix féminines dans un message pour la paix. Il y avait Aïcha Kone, Nayanka Bell, Monique Seka, Antoinette Konan, Marna Allah Thérèse qui est décédée il n’y a pas très longtemps.

A la suite de ce single, en 2014, j’ai eu l’opportunité d’être sollicitée par la Radio-Télévision ivoirienne (RTI) pour être le coach vocal d’un télé-crochet qui s’appelle « Star Karaoké ».

C’est une expérience qui m’a fait comprendre qu’il était nécessaire, et même impératif de monter des structures pour encadrer les jeunes artistes émergents en matière de coaching vocal, de renforcement des capacités en expression scénique.

C’est ainsi qu’est- née l’institution panafricaine de la voix (INPAV) d’Abidjan. C’est un projet qui m’a demandé beaucoup de don de moi-même, beaucoup d’investissement de toutes sortes : en argent et en énergie.

Comment collaborez-vous avec cette jeune génération ?

Je rends toujours grâces à Dieu, car mes rencontres sont toutes divines. Depuis Paris j’étais, sans même que je ne le sache, l’aînée que tout le monde admirait, à laquelle beaucoup voulait ressembler.

C’est quand j’ai commencé à venir fréquemment sur le continent que je me suis rendue compte que j’étais un modèle pour certains, et ça m’a fait prendre la mesure de la démarche que je devais faire pour me rapprocher davantage de la jeunesse.

J’ai eu de très belles rencontres, commençant par le Cameroun. Je suis issue d’une génération de chanteuses comme Coco Mbassi, Valérie Belinga, qui ont beaucoup donné à la musique camerounaise, les jeunes générations ne se rendent peut-être pas compte, mais il suffit de retourner toutes les pochettes d’albums de l’époque et constater qu’on a beaucoup fait dans les chœurs et accompagné de nombreux artistes, de Manu Dibango, à Tala André Marie, en passant par Sergeo Polo.

Je ne peux même pas tous les citer. J’ai eu des collaborations avec des artistes de la jeune génération comme Sanzy Viany, j’ai rencontré d’autres comme Kareyce Fotso, Charlotte Dipanda, Gaëlle Wondje, Armand Biyag, j’ai travaillé avec mon jeune frère Tony Nobody en 2013, j’étais la marraine de son Tremplin Mboa.

Mes rapports avec la jeune génération sont très amicaux, parfois des rapports familiaux. On échange, on discute. Chacun vient avec sa vision, mais on finit toujours par accorder nos violons.

Votre plaidoyer musical est très souvent axé sur la défense des droits des enfants. Pourquoi ?

Depuis le début de ma carrière, j’ai été sollicitée pour apporter ma contribution aux ONG, associations et autres organismes qui œuvrent dans l’accompagnement des enfants défavorisés. J’ai trouvé un canevas pour d’un côté, assouvir ma passion, et d’un autre, être utile à ma communauté.

L’histoire du single « Children of Africa », extrait de mon dernier album, remonte en 2018 et à ce congrès des femmes de la diaspora et de l’Afrique se sont rassemblées pour parler de l’autonomisation de la femme en Guinée, avec Alpha Condé, président en exercice de l’Union africaine à l’époque.

Pendant que nous y étions, quelque temps auparavant, il y avait eu le problème des enfants noirs de la Libye qui avaient été vendus. C’était la grande indignation. En tant qu’artiste, j’ai mis sur pied un projet pour dire à cette jeunesse qu’elle est belle, forte, et qu’elle n’a pas de complexe à se faire.

J’ai pu venir au Cameroun en 2018 promouvoir ce single sur lequel je chante avec Shaoleen, un jeune artiste ivoirien sur ce single. Ces enfants ont compris que le rêve est possible, mais il faut savoir que l’eldorado peut également être ici, mais il faut juste retrousser les manches, se mettre ensemble et ne surtout pas aller tuer son rêve à la mer.

Source: Cameroon Tribune

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