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“Manu Dibango a communiqué sa passion à des générations” – Ruben Binam

Le pianiste a accompagné son modèle à l’occasion de certains spectacles au Cameroun et ailleurs. Il rend un vibrant hommage à celui qu’il appelait papa.

Manu Dibango est décédé hier en France. Comment avez-vous accueilli cette nouvelle ?

J’ai accueilli cette nouvelle avec beaucoup de tristesse, car, évidemment je m’étais laissé rassurer par le démenti de son entourage il y a quelques jours quand la rumeur a circulé sur les réseaux- sociaux. J’ai eu encore plus mal parce que je ne m’y attendais pas.

Vous l’appeliez Papa. Peut-on savoir pourquoi ?

Au-delà de la musique, c’est un monsieur qui m’a considéré comme son propre fils. Plusieurs fois j’ai eu à « j’espère que tu as travaillé… ».  Je ramenais les disques et je faisais le point sur ce que j’avais’ fait.

Plusieurs fois il m’a aidé pour aller en Europe travailler et – »même régler des problèmes personnels par rapport à ma fille qui vit à Paris, par exemple. C’est pour ça que je peux l’appeler papa, parce que j’ai eu ce privilège d’avoir une relation extra-professionnelle avec lui qui aimait vraiment les gens et qui était toujours au service de tout le monde.

A quand remonte votre rencontre et qu’est-ce qu’il vous a apporté ?

J’ai rencontré Manu Dibango de façon directe en avril 2003 à la Pêche music-hall, alors que le groupe que je dirigeais à l’époque, Macase, s’apprêtait à l’accompagner.

Ça a été une expérience magique parce que j’étais beaucoup plus jeune qu’aujourd’hui et on se retrouvait avec les copains à jouer avec un baobab. Ça m’a marqué très profondément.

On a stressé, on a été dans la ten-sion, on a tellement préparé ce moment, on a voulu faire les choses correctement et finalement quand il est ai rivé ça s’est passé de façon très simple.

On n’a même pas joue cinq morceaux du répertoire qu’on avait préparé. Tout s’est fait.au dernier moment avec lui, dans la spontanéité et dans la sincérité artistique. L’expérience a été tellement porteuse que quelques mois après, en juillet, il nous a permis de l’accompagner à Montréal au festival Nid d’Afrique.

Et ensuite, très souvent avec le groupe Macase, on était amené à jouer avec lui en Afrique, en Europe, au Caine-i roun… Plusieurs fois aussi il est I venu jouer en comptant seulement sur ma présence.

Je me suis embarqué ainsi plusieurs fois avec le Soûl Makossa Gang, lorsque le pianiste nétait pas disponible. Plus tard aussi, en 2017, avec mon nouvel orchestre Kemit 7, j’ai eu le plaisir de célébrer avec lui les 40 ans du Cerdotola.

Ma rencontre de cœur avec lui remonte à beaucoup plus longtemps, au-delà de la scène, parce.que j’écoute la musique de Manu Dibango depuis l’âge de 10 ans, parce que dans notre famille on nous a appris à écouter les grands de la musique africaine Pierre Akendengue, Francis Bebey, Manu Dibango, etc.

Charles Binam Bikoi, mon père, a pris l’habitude de nous imposer d’écouter les grands Je suis tombé amoureux de cette musique qui était nous, mais tout en restant ouverte à un monde plus large. Aujourdhui* je considère cela comme mon héritage

Aviez-vous encore des projets ensemble ?

La dernière fois que nous nous sommes parlés, c’est lorqu’il était en Angola pour la fin d’année 2018. Son batteur, qui est un frère aussi Guy Nwgang, lui a passé le téléphone II me disait de tenir bon, qu’on ferait des choses ensemble et que je continue de travailler dans la sérénité et dans l’appli cation qu’il me connait.

Depuis 2010 aussi, il m’avait confié de valoriser ses œuvres des années 60 à 70 sur la plateforme du Cameroun. Ce que je suis encore en train de préparer

Aujourd’hui qu’il est parti, que garderez-vous comme principal souvenir de cet immense artiste ?

Je garderai le souvenir d’un homme qui a aimé le monde dans toute sa diversité, qui a aimé les gens, qui a aimé la musique et qui a communiqué sa passion à beaucoup de générations.

Je garderai le souvenir d’un homme qui avait du cœur et beaucoup de grandeur Je garderai le souvenir d’une icône, d’un monument et d’un exemple, car une chose est de suivre sa passion, une autre et d’inviter les hommes et les femmes dans cette passion de tenir compte de leur humanité, de leur vulnérabilité, de leurs faiblesses et d’accepter de travailler avec eux comme il l’a fait avec tout le monde.

Toujours prompt à rassembler et jamais indifférent aux grandes causes qui ont mobilisé et interpellé l’humanité, au point où ce virus qui interpelle encore le monde entier a pris sa vie.

Papa Manu Dibango, moi Ruben Binam, je ne t’oublierai jamais. Merci pour tout ce que tu m’as enseigné et de ce qu’au-delà de ta présence tu continues de m’enseigner. Nous ferons de notre mieux pour continuer le merveilleux travail que tu as accompli.

Source: Le Jour

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