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« N’avouez plus jamais que vous êtes malheureuse » : la lettre de Calixthe Beyala à Lady Ponce

« Très chère Lady Ponce, je vous écris ces mots, il ne m’est jamais arrivée de le faire, quelqu’un m’a envoyée vos écrits et pour la première fois je vous ai lue, j’ai perçu votre tristesse.

Sachez très chère lady Ponce que jamais un artiste n’est heureux. Qu’il s’agisse de musiciens, de chanteurs, d’écrivains, de compositeurs, d’acteurs, nous traînons tous notre ballot de tristesse le sourire aux lèvres, car on ne choisit pas ces métiers : ils vous choisissent.

Vous dites que vous avez chanté pour échapper à la faim ? Que nini ! Vous auriez pu y échapper de moult manières. Il est une chose que vous devez comprendre : nous sommes choisis par le destin pour égayer le coeur des autres ou dans mon cas, pour les amener à réfléchir.

Et en contrepartie, nous ne sommes jamais heureux. Les autres nous regardent avec admiration, aveuglés par les strass, la reconnaissance, oublieux des tourments qui sont notre lot quotidien

Personne ne nous aime jamais. Ou tout le monde nous aime, ce qui revient au même c’est – à dire personne.
Combien d’artistes se suicident dans le monde chaque jour quand ils ne se droguent pas pour oublier leurs angoisses,?

Combien parmi nous se perdent en chemin face à cette responsabilité de rendre heureux les autres, sans l’être soi ? énormément ! Et les autres se moquent :  » regardez, il est drogué ! Regardez, il a grossi ! Regardez, son mari l’a quittée ! » ils se gaussent sans comprendre le calvaire d’un créateur, d’un artiste, condamné définitivement à la solitude, parce qu’incompris.

Vous devez apprendre à être là, présente mais à avoir le coeur ailleurs, ainsi survivent les plus forts parmi nous.
Pensez vous que Michael Jackson ou Manu Dibango étaient heureux ? Que Piaf était heureuse ? Que Johnny Halliday était heureux ? Que Romain Gary était heureux ? Que Prévert était heureux ? Que Brel était heureux ?

C’est parce que nous sommes malheureux que nous écrivons de belles choses. Que nous chantons de belles choses. Soyez ici et soyez ailleurs, telle est la devise pour survivre.

Aimez tout le monde indistinctement, n’aimez personne car personne ne vous aime et tous vous aiment.
Vous voulez faire un break ? Allez y. C’est important de se replier sur soi de temps à autres au bout des dizaines d’années de cette vie où l’on donne tant en recevant si peu !!!!

Prenez une année Sabbatique ou dix années, mais ne dites pas que vous n’aimez pas votre métier, vous l’aimez !
Je vous écris parce que même si le bikutsi n’est pas ma musique de prédilection, vous êtes une vraie artiste, bien différente de celles qui sautillent, remuent du popotin et hurlent pour faire croire qu’elles sont des artistes.

Vous aimez votre métier. Votre père vous voulait nonne ? Alors, rapprochez=vous de Dieu en chantant pour Lui en attendant que le désir de faire de la scène vous revienne.

… Et pour le futur, n’avouez plus jamais que vous êtes malheureuse, une élue de Dieu ne saurait l’être… Cachez vous et pleurez seule dans votre chambre, c’est cela notre fardeau. Et si vous avez des enfants, ils sont à n’en point douter vos véritables amours. Serrez les dans vos bras, bien fort !

Courage à vous et mille bisous ».

1 réflexion sur “« N’avouez plus jamais que vous êtes malheureuse » : la lettre de Calixthe Beyala à Lady Ponce”

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