En 2023, la corruption a coûté à l’État camerounais plus de 114 milliards de francs CFA, selon le rapport annuel présenté par la Commission nationale anti-corruption (CONAC). Ce montant, qui représente une augmentation spectaculaire par rapport aux 4,6 milliards de francs CFA perdus en 2022, témoigne de la montée en flèche des pratiques corruptives dans le pays.
Dieudonné Massi Gams, président de la CONAC, a expliqué que cette somme colossale est le résultat des enquêtes menées par la commission, en collaboration avec le Conseil de discipline budgétaire et financière ainsi que le Tribunal criminel spécial. En 2023, la CONAC a réalisé 16 missions d’enquêtes, et 43 décisions ont été rendues par ces institutions compétentes en matière de détournement de fonds publics. Cette intensification des actions judiciaires explique en partie l’augmentation des pertes enregistrées.
Le rapport met en lumière les secteurs les plus touchés par la corruption, notamment l’éducation, les transports, les collectivités territoriales décentralisées, ainsi que l’administration territoriale. Des problèmes récurrents tels que le trafic d’influence, la falsification de titres fonciers et le paiement illégal pour l’obtention de documents officiels sont dénoncés par les citoyens, comme l’illustre le témoignage d’Edith Flaure Mipo, une architecte, qui pointe du doigt la prolifération des faux titres fonciers.
Cependant, deux affaires majeures, celles de Glencore et de Bourbon, dans lesquelles des agents publics sont accusés de pots-de-vin, n’ont pas été mentionnées dans le rapport. Le président de Transparency International Cameroon, Henri Njoh Manga Bell, déplore l’absence de progrès significatifs dans ces dossiers, bien que la Société nationale des hydrocarbures affirme que le Tribunal criminel spécial a été saisi. Dieudonné Massi Gams a, de son côté, appelé à la patience, soulignant la délicatesse des investigations en cours.
Par ailleurs, la lutte contre le blanchiment d’argent a également enregistré des avancées en 2023. L’Agence Nationale d’Investigation Financière a reçu 965 déclarations de soupçon, soit une augmentation de 11,05% par rapport à 2022. Ce chiffre témoigne d’une vigilance accrue et d’une volonté de renforcer la transparence financière dans le pays.
Avec près de dix mille agents publics sanctionnés ou licenciés pour manquement à l’éthique, le Cameroun semble intensifier ses efforts dans la lutte contre la corruption. Toutefois, le chemin reste encore long pour enrayer ce fléau, qui continue de coûter cher à l’État et de compromettre le développement national.