Le Cameroun s’illustre dans la lutte contre les abus sexuels au sein de l’Église, mais se heurte à de nombreux obstacles, notamment culturels, selon un récent rapport de la Commission pontificale pour la protection des mineurs.
Par MMI
Publié le 28 octobre, le premier rapport annuel de la commission a évalué les mesures de protection mises en œuvre par les évêques dans 17 régions du monde. Il met en évidence les domaines dans lesquels l’Église a du mal à gérer les cas d’abus de manière transparente.
Les conclusions de la commission ont révélé un « manque troublant de structures de signalement et de services d’accompagnement des victimes/survivants » dans certaines régions. Le rapport a également attiré l’attention sur l’opacité procédurale de la Curie romaine. Il prévient que cela « continuera à susciter la méfiance parmi les fidèles, en particulier parmi la communauté des victimes/survivants ».
Principales recommandations pour une réforme
Le rapport a émis plusieurs recommandations cruciales pour renforcer la protection des survivants d’abus. Il s’agit notamment d’appels à une compensation financière pour les survivants, de la nomination d’un « procureur » dédié pour défendre les victimes et d’un appel au pape François pour qu’il publie une lettre encyclique axée sur la protection des enfants et des adultes vulnérables.
Lors d’une conférence de presse à l’issue de la visite du pape François en Belgique, le cardinal Sean O’Malley, l’un des responsables des efforts de protection de l’Église, a reconnu qu’il « restait encore beaucoup à faire ». Il a félicité les survivants pour leur résilience et a réitéré l’engagement de l’Église à mettre en place un « ministère de protection transparent et responsable ».
Défense des droits des survivants et incitation à la transparence
Juan-Carlos Cruz, un survivant chilien d’abus commis par des membres du clergé et membre de la commission, a exprimé sa reconnaissance pour le soutien constant du pape François aux survivants d’abus et a décrit le rapport comme une « première étape importante » vers la résolution de ces problèmes.
Il a toutefois noté qu’une transparence limitée, notamment la non-divulgation d’informations et des enquêtes « opaques », risquait de retraumatiser les survivants. Cruz a souligné l’importance de la transparence dans les procédures du Vatican pour les cas d’abus et a appelé à des améliorations pour éviter de nouveaux préjudices aux survivants.
Obstacles culturels au signalement au Cameroun
Le rapport aborde spécifiquement la situation au Cameroun, où les normes culturelles et les tabous sociétaux constituent des obstacles importants au signalement des abus. Les valeurs traditionnelles au Cameroun découragent souvent les discussions ouvertes sur les abus sexuels, ce qui rend difficile pour les victimes de se manifester.
Cette réticence culturelle affecte la capacité de l’Église à s’attaquer aux abus de manière globale, car les membres de la communauté et les responsables de l’Église peuvent éviter de s’engager dans un dialogue ouvert sur le sujet.
La commission a appelé à des initiatives pour promouvoir la sensibilisation et créer des systèmes de soutien qui reflètent le contexte culturel unique du Cameroun.
Impact de l’instabilité politique sur le signalement des abus
A ces défis s’ajoutent les conflits internes persistants au Cameroun, comme la crise anglophone, qui aggravent les difficultés à lutter contre les abus commis par le clergé.
L’instabilité humanitaire et politique a mis à rude épreuve les institutions locales, entravant la capacité de l’Église à établir des structures adéquates pour signaler les abus et soutenir les survivants. Ces crises compliquent encore davantage la réponse de l’Église aux cas d’abus, risquant de faire baisser la confiance du public.
Critiques de la gestion des cas d’abus par le Vatican
Le rapport de la commission a également soulevé des inquiétudes concernant le Dicastère pour la doctrine de la foi (DDF) du Vatican, l’organisme chargé de traiter les cas d’abus commis par le clergé.
La DDF a partagé « des informations statistiques limitées sur ses activités », et les procédures longues pour les cas d’abus peuvent laisser les survivants se sentir à nouveau traumatisés. Le rapport critique également le contrôle du clergé, en particulier la minimisation des évaluations psychologiques lors de l’évaluation des candidats à la prêtrise.
En outre, le rapport cite des problèmes troublants au sein de l’organisation caritative de l’Église, Caritas. Il fait référence au cas de Luk Delft, un directeur de Caritas en République centrafricaine, qui a été accusé d’abus sur enfant, soulignant les lacunes dans les mesures de protection au sein de l’organisation.
Des progrès malgré les défis
Malgré les inquiétudes soulevées, le cardinal O’Malley a souligné que le rapport mettait également en évidence « de nombreux autres cas » où la commission a observé un « régime de protection solide et professionnel » au sein de l’Église.
Il a cité des exemples de pratiques de protection efficaces dans d’autres régions, soulignant que l’Église fait des progrès vers la transparence et la responsabilité, même si des défis importants subsistent dans des régions comme le Cameroun.
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