Régis Debray vient tardivement nous parler dans son dernier livre, « L’Exil à domicile », de ce qu’il ressent et pense dans la dernière partie de sa vie. Son livre reflète à la fois la détresse psychologique d’un homme qui voit venir la mort et les fluctuations idéologiques qui l’agitent, au point qu’on ne reconnaît plus l’homme de la gauche militante qu’il était et qui paie parfois désormais dans un esprit intellectuel et pessimisme politique.
L’ouvrage dans son aspect strictement littéraire est plutôt remarquable par son ironie brillante, son humour caustique et ses calembours ! A quoi s’ajoute tout ce qui exprime le vieillissement avec le temps qui, en passant, vous fait préférer le présent aux projets d’avenir et vous fait vous réfugier dans la mémoire de ce qui a été, avec sa propre richesse, et qui n’est plus. Mais il reste des appréciations sur ce qui est, dans le temps présent, même s’il passe : sensations, émotions, contemplation, etc. L’auteur fait ici preuve de délicatesse et de sensibilité. Mais il y a aussi l’autre aspect de l’œuvre, qui révèle ce qu’il faut bien appeler un désespoir ou un désenchantement idéologique, compte tenu de ce qu’il a été, fait et pensé. Cela s’entend dans la perspective progressiste qui fut jadis la sienne lorsqu’il était du côté de Che Guevara et de Cuba, mais plus largement dans l’amélioration politique du monde humain telle que Marx la concevait.
Références douteuses
On le voit ainsi ironiquement, mais tristement, sur ce que notre époque nous offre, parfois à juste titre lorsqu’il pointe du doigt l’américanisme qui nous envahit dans bien des domaines ou la disparition de l’idée de « nation ». Il le fait avec des références discutables, comme celle qu’il faudrait, pour unir une communauté, le recours à quelque « transcendance », religieuse ou non, comme celle de l’idée d’une communauté d’appartenance qui transcenderait inévitablement ceux qui le composent.
On ajoutera à l’intérêt pour le lecteur toutes les remarques désabusées, mais incisives et brillantes sur le monde de la politique, ses acteurs et leurs motivations : le goût du pouvoir, leur insincérité, leur cynisme et leur ambition, leur attrait pour la gloire, voire s’il change. Tout cela comme si rien ne pouvait changer à cause d’une possible « nature humaine » immuable, pleine de défauts, oubliant que l’homme est aussi un produit de l’histoire, ce que Marx et les sciences humaines nous ont appris et qu’il ne veut pas entendre. Un livre qui mérite d’être lu pour ses qualités littéraires et son humour, mais aussi critique, de par ses options théoriques et politiques.
Grb2
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