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Dossiers secrets : quand la CAN occulte le Covidgate

Les autorités de Yaoundé, pressées par l’opinion publique et la presse sur la gestion mafieuse de l’argent du Coronavirus, se sont réfugiées depuis un mois derrière la CAN, le temps que cette compétition a duré. 

Aristide Mono a bien compris le jeu de certains camerounais qui se croient plus malins que d’autres :  » A chaque fois que le Cameroun est engagé dans une compétition internationale, les ultra patriotes se montrent très intransigeants avec l’amour pour la patrie. A ce moment, le « vert, rouge, jaune» est plus que sacré. Ils sont très nerveux lorsque vous ne supportez pas l’équipe nationale. Ils estiment que c’est très scandaleux; que vous avez franchi la ligne rouge. Même ceux de l’opposition qui souhaitent souvent toute la malchance du monde à notre armée au front, sont hyper révoltés».

Et il poursuit : «Pour ces opposants qui banalisent régulièrement le sacrifice suprême de nos petits frères au front, on peut blaguer avec tout, sauf avec le football ; donc, union sacrée! Ils demandent aux familles des prisonniers politiques de faire l’union sacrée derrière la Can et les lions indomptables. De taire leur haine à l’égard du régime qui maintient injustement leurs enfants dans les prisons, parce qu’en ce moment précis de la CAN, le Cameroun a besoin plus que jamais de l’Union sacrée; les étrangers sont chez nous. Il faut taire nos querelles»!

Ce discours a manifestement marché. Puisque même les opposants les plus intrépides du régime de Yaoundé sont restés très dociles. Le temps que la grand- messe continentale que notre pays a attendu un demi-siècle pour laborieusement organiser, passe. C’est d’ailleurs à partir du soir de la finale Egypte-Sénégal que certains internautes très impatients ont commencé à demander que le Cameroun revienne à ses affaires. Le dernier, plus pressant, qui vient s’amonceler sur. les autres, est l’argent dédié à la gestion du coronavirus.

Trois commissions d’enquête

Il y a un an, trois institutions avaient été successivement saisies pour faire la lumière sur la gestion du volumineux pactole du Covid 19. C’est le 15 décembre 2020 que l’opération est lancée par le ministre d’Etat secrétaire général de la présidence de la République, Ferdinand Ngoh Ngoh.

Parlant d’une «Mission spéciale d’audit des fonds relatifs à la lutte contre le Covid-19», il avait saisi le ministre des finances, Louis Paul Motaze : «j’ai l’honneur de vous demander de bien vouloir débloquer et mettre à la disposition du Ministre délégué à la Présidence de la République çhargé du contrôle supérieur de l’Etat, une dotation de 32 555 000 (trente-deux millions cinq cent cinquantecinq milles, ndlr) Fcfa destinée à la couverture des frais relatifs à la mission portée en objet».

La dotation de quelques 32 millions de Fcfa alloués aux enquêteurs du contrôle supérieur de l’Etat pour réaliser une telle mission avait déjà irrité beaucoup d’observateurs avertis des missions de cette institution d’Etat. Et avait suscité moult interrogations dans l’opinion. Parce que ceux chargés de mener cette enquête étaient des fonctionnaires, dans leur rôle traditionnel.

Alors que la mission du Consupe n’avait pas encore rendu sa copie, la Chambre des comptes de la Cour suprême était aussi engagée dans le même dossier. Un télescopage avait été évité, parce que le contrôle supérieur de l’Etat s’était limité au ministère de la santé, tandis que la Chambre des comptes avait cuisiné toutes les administrations impliquées dans la gestion de ce pactole. Une information que seuls détenaient les «initiés».

Les ministères bénéficiaires

Les investigations de la mission de la Chambre des comptes avaient donné une idée de la répartition de la manne du Fonds spécial :

  • ministère de la Santé publique (45,63 milliards de Fcfa);
  • ministère de l’Economie, de la planification et de l’aménagement du territoire, (26 milliards Fcfa),
  • ministère des enseignements secondaires (7 milliards Fcfa), ministère de l’Education de base (6,5 milliards Fcfa),
  • ministère de la Recherche scientifique et de l’innovation (6,1 milliards Fcfa),
  • ministère de l’Enseignement supérieur (6 milliards Fcfa),
  • ministère de l’Agriculture et du développement rural (6 milliards Fcfa),
  • ministère de la Défense (3,6 milliards Fcfa),
  • Délégation générale à la sûreté nationale (3 milliards Fcfa),
  • ministère de la décentralisation et du développement local (2,5 milliards Fcfa),
  • ministère des Petites et moyennes entreprises, de l’économie sociale et de l’artisanat (2 milliards Fcfa),
  • ministère des Pêches et des industries animales (2 milliards Fcfa),
  • ministère du Tourisme et des Loisirs (1,7 milliard Fcfa)…

Selon nos sources, les premières informations parvenues au président de la République étaient accablantes. Sous les feux de l’action, le ministre d’Etat secrétaire général de la présidence de la République avait adressé au ministre de la justice garde des sceaux, sur instructions du président de la République, de «hautes directives».

L’orientation était même donnée, comme si les coupables étaient déjà connus: «j’ai l’honneur de vous répercuter les hautes directives du chef de l’Etat, prescrivant l’ouverture d’une enquête judiciaire contre les auteurs, coauteurs et complices des cas de malversations financières y relevés».

Avant le début de la Can, toutes les enquêtes étaient presque bouclées. «Des responsables parmi les plus insoupçonnés sont mouillés jusqu’au cou dans ce scandale. Si le président de la République veut frapper tous les coupables, équitablement, c’est l’effondrement de son régime. Ne soyez donc pas surpris que le Covidgate ne devienne finalement qu’un écran de fumée», nous confiait une source introduite.

La Nouvelle Expression

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