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Cameroun/Suppression d’ouvrage : une famille exige la démolition d’une chapelle à Yaoundé

Alors que leurs grands-parents avaient jadis autorisé à l’église catholique de construire une chapelle sur leur terre, la donation est remise en cause cinquante ans plus tard. 121 millions de francs demandés à l’épiscopat pour déposer les armes.

Dieu pourrait bientôt quitter le quartier Elig Belibi à Yaoundé. En tout cas, si la justice ordonne la démolition de la chapelle catholique éponyme. C’est d’ailleurs un souhait nourri depuis une décennie par Benoît Gauthier Essomba et certains membres de sa famille réunis en la collectivité Mvog Awou-Ngono II qui revendiquent la propriété du terrain sur lequel est érigé cette bâtisse. L’examen du recours en «suppression d’ouvrage» que les concernés avaient introduit le 10 mars 2010 devant le Tribunal de grande instance (TGI) du Mfoundi vient de connaître un véritable coup d’accélérateur.

En effet, le 28 mai dernier, le juge civil de la juridiction en charge de l’examen de cette affaire a ordonné une expertise cadastro-immobilière à l’effet de déterminer le coût, la valeur des investissements de i’Archidiocèse de Yaoundé et la plus-value de toutes ses réalisations sur le terrain au centre du procès. Cette formalité était sollicitée par l’archidiocèse, partie dans la procédure judiciaire, et présentée comme préalable à toute action de déguerpissement.

Le tribunal a mis les frais de l’expertise alléguée à la charge des parties au procès parmi lesquelles on compte également, entre autres, la désormais super mairie de Yaoundé. Les arguments développés par les parties dans différents documents consultés par Kalara permettent d’avoir une idée précise sur la bagarre autour de la chapelle d’Elig Belibi.

Cimetière de Mvolye

La bataille judiciaire entre la collectivité Mvog Awou-Ngono II et l’Archidiocèse de Yaoundé remontent dans les années 1960. Cette époque-là, les grands-parents des plaignants, sous l’instigation de feu Fouda André, alors délégué du gouvernement auprès de la Communauté urbaine de Yaoundé (CUY) autorisaient l’église catholique de construire une «case chapelle» sur leur terre.

La CUY sous la férule de son patron avait érigé la bâtisse sur ses fonds propres et avait rétrocédé l’immeuble à l’église catholique. Cette chapelle est bâtie sur une superficie de 1000 mètres carrés soit une partie d’une superficie totale de 6462 que couvre le titre foncier No 070/Nyong Sanaga délivré le 8 janvier 1958 à Pierre Ndoumou, le défunt grand-père des plaignants.

La bande à Essomba affirme qu’en contrepartie de l’installation de la chapelle, «l’archidiocèse promettaient à la collectivité Mvog-Awou-Ngono 11, à titre gracieux, des parcelles au cimetière catholique de Mvolye pour enterrer leurs membres décédés». Selon les plaignants, l’église catholique n’a pas tenue parole, car «l’archidiocèse n’a jamais accordé ces facilités astreignant plutôt les membres de la collectivité au paiement des espaces».

La pomme de discorde concerne une somme de 31,3 millions de francs perçue en 2009 par I’Archidiocèse de Yaoundé au titre de l’indemnisation des victimes des travaux de canalisation du fleuve Mfoundi. En effet, onze ans auparavant, le 3 juin 1997, le Premier ministre avait pris un décret «allouant des indemnités aux personnes victimes de destruction de cases et cultures sur des terrains nécessaires aux travaux de recalibrage du Mfoundi aval».

Le problème, une partie du terrain sur lequel est construit la chapelle Elig Belibi faisait partir de l’emprise. Pour les plaignants, parce que l’archidiocèse ne dispose pas d’un titre de propriété sur le terrain exproprié, il n’avait de ce fait aucune qualité à percevoir l’indemnisation en contrepartie de la diminution du domaine querellé. Ils avaient en vain réclamé à l’archidiocèse de leur rétrocéder cet argent.

Face au refus, les plaignants considèrent désormais que l’installation de la chapelle critiquée est abusive et préjudicie à leurs intérêts. Leur recours s’arc-boute sur l’article 555 du Code civil qui dispose : «Lorsque les plantations, constructions et ouvrages ont été-faits par un tiers èt avec ses matériaux, le propriété du fonds a droit ou de les retenir, ou d’obliger ce tiers à les enlever […] la suppression… est aux frais de celui qui les a faites, sans aucune indemnité pour lu ; il peut être condamné à des dommages intérêts, s’il y a lieu pour le préjudice que peut avoir éprouvé le propriétaire du fonds…»

Pour sa part, l’Archidiocèse de Yaoundé sous la plume de Me Wamba Mankob, argue que l’installation aujourd’hui conspuée a été faite de «bonne foi». L’avocat explique que c’est du fait de l’ex-Communauté urbaine d-Yaoundé et des patriarches d’Eiig Belibi que son client occupe l’espace litigieux. Pour asseoir cet argumentaire, il avait déposé le 18 juillet 2017 une assignation en intervention forcée à l’encontre de la CUY devenue entre-temps la super mairie de Yaoundé et d’autres membres de la famille des plaignants. Ce qui contraint les concernés à s’introduire obligatoirement dans le procès.

De fait, Me Wamba Mankob estime que la bande à Essomba tente de «dédire» leurs ascendants. Or les héritiers qui ont acceptés la succession sont tenus par les engagements de leurs défunts parents. Ce qui signifie que l’heri-tier reçoit l’actif et le passif de la succession. Il indique que le titre foncier dont se prévaut tes plaignants n’a pas encore été muté en leurs noms.

Offre de transaction

Au fond l’avocat estime que son client ayant été installé sur le site litigieux «par ceux qui avaient légalement et légitiment l’aptitude de le faire» et ne peut être déguerpi sans être dédommagé, il s’appuie sur l’alinéa 3 de l’article 555 du Code civil déjà évoqué qui accorde au constructeur de bonne foi une indemnité d’éviction.

Entre autres jurisprudence citée, l’arrêt de la Cour suprême rendu le 17 janvier 19692 dans l’affaire Essomba Jean contre Owona Simon Pierre : «le propriétaire d’un terrain qui exerce contre un occupant de bonne foi son action en revendication, et qui obtient la restitution de son bien, ne peut forcer ce dernier à déguerpir qu’après l’indemnisation des investissements par celui-ci».

Contrairement aux déclarations des plaignants, Me Wamba Mankob déclare que son client et les quatre familles constituant la collectivité ont conclu avec I’Archidiocèse de Yaoundé un accord de répartition et de restitution des fonds issus de l’indemnisation à l’origine des tension Selon cet accord, un montant de 9,3 millions de francs de l’enveloppe reviendrait à l’église catholique du fait de la destruction d’une partie de ses investisse ments, le reste soit 22 millions aux familles coutumièrement propriétaires des terres.

A ce jour, l’église a d’o,res et déjà restitué 15 millions de francs auxdites familles. Le reste du paiement est suspendu du fait d’une «discorde» entre ces familles. L’avocat révèle que son client a reçu de M. Essomba, le chef de file des contestataires, une «offre de transaction» d’un montant de 121,3 millions de francs le 23 janvier 2017 pour abandonner l’affaire. Me Wamba souhaite qu’une fois l’expertise alléguée aura déterminé le coût des investissements de son client, les plaignants devraient être condamnés à verser à i’Archidiocèse de Yaoundé «une indemnité d’éviction au cas contraire, il opérera un légitime droit de rétention, jusqu’à paiement complet».

Source : Kalara

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