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Réduction des heures de cours : l’école sacrifiée à l’autel de la jouissance footballistique ?

En décidant de vider les salles de classe pour remplir les stades de football, le président de la République a chamboulé l’emploi du temps de l’année en cours avec pour risque direct, la non couverture totale des programmes si un ajustement du calendrier scolaire n’est pas opéré après la Can.

Depuis le début de la 33e édition de la Coupe d’Afrique des nations, seul le stade Olembé a été bondé lors du match d’ouverture. Les matchs qui ont suivi que ce soit dans ce stade ou dans les autres, les gradins ont manqué de spectateurs.

Face à cette situation et sur très hautes instructions du président de la République, le premier ministre, chef du gouvernement, a, à travers une note signée de son secrétaire général, informé la communauté nationale que, pendant les jours de la tenue des rencontres de la Can Total Energies 2021, les activités scolaires et académiques se tiendront de 7h 30 à 13 h et les activités professionnelles s’étaleront de 7 h 30 à 14 h.

Ledit communiqué précisait que « cette mesure exceptionnelle, qui s’appliquera effectivement dans le secteur public, à compter du lundi 17 janvier 2022 jusqu’au vendredi 4 février 2022, a pour objectif de permettre aux camerounais de prendre une part active à cet évènement continental d’envergure ».

Une décision qui a particulièrement choqué la communauté éducative. « Ce ne sont pas les élèves qui doivent remplir les stades. Ce sont les adultes. Il faut aller dans les associations, les coopératives. Il y a même les moto-taximen, les taximen, les apacheurs et tout. Mais pas les élèves », s’offusque une enseignante sous couvert d’anonymat. Mais parce que l’ordre est venu de la plus haute hiérarchie, les responsables de divers établissements ont pris des mesures pour se conformer.

Confinement

Au lycée de Minkan par exemple dans la ville de Yaoundé, région du Centre, où les cours étaient dispensés en journée continue, un nouveau programme a été établi.

« On a réorganisé nos emplois du temps. Les élèves des classes d’examens, notamment les 3e, 1ère et terminales, viennent à l’école lundi, mercredi et vendredi. Et les élèves des classes intermédiaires viennent à l’école mardi et jeudi. Les jours qu’ils ne viennent pas dans l’i’nfervalle 7h30-l3h, ils reçoivent les cours dans le cadre du E-learning. Il y a aussi des supports de cours physique qu’on leur remet avec tes fiches de T.d », révèle un membre de l’administration du lycée qui a requis l’anonymat.

Dans d’autres lycées qui faisaient la mi-temps, les responsables ont décidé de diviser la poire en deux. C’est le cas du lycée d’Ahala, toujours à Yaoundé.

« Ici on fait l’alternance des classes. Donc le groupe du matin fait cours de 07h30 jusqu’à lOh et le groupe de l’après-midi fait maintenant cours de lOhlO à I3h », informe un enseignant dudit lycée qui a refusé que son nom soit cité dans l’article. Et de poursuivre « Mais c’est du n’importe quoi. Parce qu’on te donne environ 30 à 40 minutes pour faire ta leçon que tu donnais en 2h. Tu ne peux rien dire de consistant pendant ce temps très court et insuffisant ».

D’autres enseignants par contre ont décidé de faire fi de cette décision gouvernementale. Selon eux, cela vient davantage contribuer à rendre nuis leurs élèves qui ont pour la plupart vu leur niveau baissé à cause du confinement imposé par le coronavirus l’année dernière.

Droit fondamental

Pour ces différents enseignants, il y a plutôt urgence à agir pour relever leur niveau. Même si cela se fait sans l’accord et sans être soumis à la connaissance de leur hiérarchie directe.

« A cause du coronavirus et les différentes interruptions des cours qu’on a connu pendant le confinement l’année dernière, le niveau des élèves est devenu très bas. Tous les enfants nouvellement arrivés en classe d’examen provenant d’une classe intermédiaire n’ont pas vraiment le niveau. Maintenant qu’on se bat pour remonter la pente, on veut encore les rendre plus nuis avec la distraction de la Can », confie une enseignante d’un établissement de la place.

Et d’ajouter « j’avais pris la résolution de travailler avec mes élèves jusqu’à 17h tous les jours pour qu’ils aient un bon niveau. Parce que lors du 1er trimestre, aucun élève n’a pu avoir la note de II sur 20 en mathématiques alors que c’est leur matière de base (coefficient 6) sur laquelle on va les délibérer au baccalauréat. Donc je ne peux pas fléchir à cause de cette décision du gouvernement ».

Toutefois, la décision du président étant rendue obligatoire sur l’ensemble du territoire national, les enseignants courent le risque de ne pas couvrir la totalité de leur programme d’enseignement/apprentissage qui s’étale en principe sur 36 semaines.

Il y a aussi risque que l’ensemble des cours dispensés à un élève au cours de cette année scolaire soit inférieure à 900 heures (le temps des évaluations non compris) comme le prescrit l’Unesco. Toute chose qui amène déjà de nombreux enseignants à penser à un réajustement du calendrier scolaire pour sauver l’année en cours.

« Les dates doivent obligatoirement être prolongées pour deux ou trois semaines parce qu’il faut absolument couvrir tout le programme de l’année scolaire », asserte l’un d’eux. Un réajustement sans lequel, le chef de l’Etat aura délibérément choisi de sacrifier l’éducation (droit fondamental) pour le fanatisme du football (loisir).

Le Messager

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