La violation de leurs droits légaux et le non paiement de leurs primes de bonne séparation dans la cession des actifs du géant français au groupe italo-suisse, a mis les employés camerounais sur les dents. Une grève est en vue !
Avis de tempête au sein du groupe Bolloré au Cameroun ! Tout commence le 31 mars, lorsque le groupe italo-suisse Mediterranean Shipping Company (Msc) conclu un accord avec le groupe français pour la reprise de 100% de ses actifs.
Selon le communiqué officiel du groupe Bolloré que Le Messager a pu consulter, le groupe italo-suisse reprend donc 100% de Bolloré Africa Logistics (Bal) qui regroupe l’en- semble des activités de transport et logistique du géant français sur le continent africain, notamment au Cameroun. Au regard des multiples spéculations qui entouraient ce dossier classé top secret, la firme a vite fait de rassurer ses collaborateurs inquiets quant à l’avenir de leurs emplois.
« Msc est un groupe familial, européen, qui s’inscrit dans la durée et place ses collaborateurs au cœur de sa stratégie d’entreprise », indiquait le top management dans sa communication. Au Cameroun, les employés du groupe français estiment avoir été lésés dans ce processus.
Selon les délégués du personnel, la transaction conclue entre le Groupe Bolloré et Mediterranean Shipping Company (Msc) s’est faite en violation des droits légaux des employés camerounais. Ils exigent aussi du géant français, le paie- ment de la prime de bonne séparation. Pour soutenir leur revendication, les délégués du personnel évoque la législation en vigueur au Cameroun en cas de modification de la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation.
Dilatoire
En réponse aux représentants du personnel, le directeur général, Cyrille Bolloré, indique que « c’est Bolloré SE qui vend les actions qu’elle détient chez Bolloré Africa Logistics ». Aussi, souligne le Dg, Bolloré SE étant une entreprise immatriculée en France, il est logique que ce soient les représentants du personnel en France qui aient été consultés et non pas les délégués du personnel du Cameroun.
De plus, ajoute le fils de Vincent Bolloré, « au Cameroun, il n’y a pas d’évolution dans l’actionnariat des sociétés Bolloré Transport & Logistics et Socopao Cameroun, donc Bolloré Africa & Logistics qui ne change pas de statut juridique, demeure l’actionnaire majoritaire ». Par ailleurs, indique-t-on, l’entité Bolloré Africa Logistics restera indépendante.
« Il n’est pas prévu de fusion avec MSC. Il n’y aura pas de changement dans nos organisation du Cameroun », précise Cyrille Bolloré. Des réponses qui sont loin des attentes des délégués du personnel. Ces derniers réclament d’ailleurs l’application des dispositions de l’article 42 du Code de travail et une réponse écrite à leur correspondance du 1 er mars 2022 portant sur le respect des dispositions légales dans le cadre d’une éventuelle cession d’actions au Cameroun, pour la sérénité du climat social.
Le 4 avril en urgence, s’est tenue une réunion entre les représentant de la direction générale et les délégués du personnel. Il a été convenu à l’issue de cette rencontre que la direction générale répondra dans les brefs délais à la correspondance des délégués du personnel du 1er mars 2022. Il a également été adopté que le directeur général transmettra les éléments de droit qui fondent la conviction du groupe sur le fait que les dispositions de l’article 42 du Code du travail camerounais ne sont pas applicables dans ce cas précis.
Jurisprudence
Pour l’heure, et selon les informations du Messager , les délégués du personnel n’ont reçu aucune réponse. Au contraire, direction générale se réfugie derrière un dilatoire qui n’arrange pas les choses. Les délégués du personnel dénoncent un « double discours » et des « engagements non tenus ».
Signalons qu’une situation similaire s’est produite en 2013 lorsque la société ADER Cameroun a été rachetée par Louis Dreyfus, négociant de produits agricoles qui a été pendant longtemps leader mondial dans l’import-export de coton et de riz, mais aussi très bien implanté dans le commerce du café ou des oléagineux. La société ADER qui est devenue « Louis Dreyfus Commodities Cameroon » a été revendue par la suite et est devenue Solevo Group.
Au cours de ces différents changements, les paiements des droits des travailleurs des sociétés BLT et Socopao Cameroun ont été effectués, à l’instar de la prime de bonne séparation.
« C’est une grosse incongruité de penser que seuls les employés de France devraient bénéficier des droits simplement parce que l’entreprise a été immatriculée en France. Cette même entreprise a fait des chiffres au Cameroun avec des employés camerounais, il est donc normal que les droits des Camerounais soient pris en compte par la direction générale de Bolloré Africa Logistics », soutient Germain Nnaga, analyste économique et chercheur.
Face à la réticence de la direction générale, les délégués du personnel sont décidés à aller jusqu’au bout et employer la manière forte pour faire entendre leur voix. Mais la partie est toutefois très loin d’être gagnée.
Le Messager