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La France restitue des faux crânes des combattants algériens décapités

Alors qu’Emmanuel Macron rendait hommage, ce mardi, aux combattants de la guerre d’Algérie, une révélation du New York Times pourrait chambouler la nouvelle idylle franco-algérienne.

Selon le quotidien américain, seuls 6 des 24 crânes restitués par Paris en juillet 2020 étaient ceux de résistants algériens tués au XIXe siècle par les troupes coloniales françaises. «Les autres ne le sont pas ou sont d’origine incertaine.»

Ces restes mortuaires sont également restés la propriété de la France après leur remise, indique le média, qui se base sur des documents obtenus auprès du musée d’Histoire naturelle et du gouvernement français. Aucun des deux pays n’a publiquement reconnu ces faits, «alors qu’ils cherchent à tirer un avantage diplomatique de la restitution».

Trophées de guerre

Le retour en Algérie de ces crânes avait pourtant été célébré en grande pompe. A la veille de la commémoration du 58e anniversaire de l’indépendance algérienne, le président Abdelmadjid Tebboune était venu en personne accueillir les restes sur le tarmac de l’aéroport d’Alger, s’inclinant devant les cercueils lors d’une cérémonie militaire solennelle. Il s’agit «des dépouilles de 24 chefs de la résistance populaire, qui ont été privés de leur droit naturel et humain d’être enterrés depuis plus de 170 ans», avait assuré le chef de l’Etat.

Diplomatie

Trois ans auparavant, Emmanuel Macron s’était engagé, lors de sa première visite officielle à Alger, à ce que la France restitue les crânes des martyrs algériens, considérés au XIXe siècle comme des trophées de guerre par les militaires français et conservés jusqu’alors dans les collections du musée d’Histoire naturelle, à Paris.

Une manière d’apaiser les relations tumultueuses entre les deux pays, alors que des historiens algériens comme français appelaient à ce retour depuis des années. Cette restitution a une nouvelle fois été saluée lors du déplacement de la Première ministre Elisabeth Borne, les 9 et 10 octobre, à Alger.

«En catimini»

Pour le New York Times, ce «retour imparfait» s’explique par un problème plus large de restitutions souvent «secrètes, confuses et politiquement opportunes» de la part de la France, qui tente de remodeler sa relation avec le continent africain : «Certains universitaires et députés s’inquiètent de plus en plus des restitutions qui semblent échapper à la rigueur scientifique et législative.»

Citée dans l’article, la sénatrice française Catherine Morin-Desailly regrette ce rapatriement «bâclé, fait en catimini». Le comité franco-algérien mis en place pour déterminer les restes qui pourraient être restitués à l’Algérie avait identifié, en juin 2020, 24 crânes susceptibles d’être renvoyés, sur un total de 45 datant de la colonisation.  «Mais les recherches ont été écourtées par le bureau d’Emmanuel Macron, qui souhaitait que les crânes soient restitués avant le 5 juillet, jour de l’indépendance de l’Algérie.»

Contacté par Libération, l’historien Benjamin Stora, est plus nuancé : «Comment faire la distinction entre le résistant politique anticolonial conscient, tué les armes à la main, et le bandit opposé à la colonisation ? La frontière entre les deux est extrêmement mince.»

Pour l’auteur du rapport sur la mémoire de la colonisation et de la guerre d’Algérie, la restitution des 24 crânes, qu’ils appartiennent ou non à des «résistants», a participé à l’approfondissement des connaissances sur «l’horreur qu’a été la colonisation française des années 1850».

En raison du caractère inaliénable des collections nationales, seules les lois d’exception peuvent garantir la restitution d’un objet ou d’un ensemble de pièces. L’accord entre Paris et Alger stipulait d’ailleurs que les restes mortuaires avaient été prêtés à l’Algérie «pour une période de cinq ans», dans l’attente d’une restitution inscrite dans la loi, qui n’existe toujours pas.

Libération

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