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Ekambi Brillant, parcours et mort d’un géant

Hommage à Ekambi Brillant

C’est avec une tristesse indicible que nous avons accueilli la nouvelle du décès d’Ekambi Brillant.

Ekambi Brillant était un père pour moi. Nous entretenions une relation de père et fils. Il ne se passait pas une semaine sans que nous n’échangions. Il avait beaucoup de projets qu’il n’aura malheureusement pas le temps de mener à son terme.

Chanteur de charme et de talent, Ekambi Ekambi Louis Brillant est né le 18 juin 1948 à Dibombari. Celui qu’on surnomme Mot’a Muenya (l’homme important) a contribué à révolutionner le Makossa en y introduisant le piano, les instruments à vents et le violon. Il est aussi connu pour son élégance remarquable. Il est le premier artiste camerounais qui a su incarner le mot « Star ».

A sa naissance, sa mère tombe gravement malade et le bébé âgé d’à peine deux jours est confié à sa grand-mère qui se trouve sur l’île de Djébalè. Il a été bercé dès la tendre enfance au rythme des mélodies religieuses.

Ancienne d’église et choriste, sa grand-mère l’emmenait avec elle aux répétitions de la chorale en prenant soin de mettre le bébé dans une corbeille. Il a tété les seins de sa grand-mère jusqu’à l’âge de 7 ans. Sur l’île de Djébalè où il vivait avec ses grands-parents, il se forme au chant en regardant chanter les piroguiers qui rentraient de la mer.

En 1962 contre toute attente, il est admis au concours d’entrée en 6e au Lycée Général Leclerc de Yaoundé. C’est là qu’il fait ses premiers pas dans la musique. Il y rencontre Zane Daniel, professeur de musique d’origine française qui l’initie à la musique et lui apprend le solfège et à jouer de la guitare. Le virus de la musique s’empare de lui et il intègre l’orchestre du Lycée Général Leclerc.

Dès 1968, il profite des vacances scolaires pour aller prester en tant que guitariste dans les cabarets de la ville de Douala. En 1971, âgé de 21 ans, il arrête définitivement les études en classe de seconde et se produit en plein temps avec Les CRACK’S au night-club le Domino. Délaissant progressivement la guitare, il passe au chant en interprétant la variété française, le Blues, le Rock, etc. A ses débuts, il était un peu complexé par sa voix, il la trouvait rauque.

Son groupe anime les bals scolaires et écume les cabarets entre Douala et Yaoundé.
En 1971, il est lauréat d’un concours de musique organisé par l’Office de Radiodiffusion Télévision Française (ORTF) avec le titre Djongele la Ndolo (les pensées vers mon amour). Ce prix lui permet de sortir son premier 45 tours Djongele la Ndolo chez DECCA en France.

Ce sera un succès commercial : 20 000 ventes. Il continue à travailler avec Les CRACK’S pendant quelque temps avant de quitter le groupe à cause de quelques divergences pour entamer une carrière solo.

Il prend son envol et organise son premier concert au centre culturel français de Douala et par la suite au cinéma le Wouri. Bénéficiant du soutien du bassiste camerounais Jean Dikoto Madengué, il arrive en France et sort son second 45 tours chez Phonogram avec qui il a signé un contrat.

Phonogram le produit mais Jean Dikoto Madengué s’occupe des arrangements et des enregistrements. Le disque est également un succès avec 25 000 ventes. En 1973, il participe au premier festival de la chanson camerounaise . A cet effet, il rencontre un groupe de jeunes camerounais basés à Ndjaména : les Black Sound avec qui il répète au Nice Spot. Il y fait la rencontre d’une jeune dame qui chante très bien. Cette femme, c’est Marthe Zambo. Il la prend sous son aile.

Elle commence par faire ses chœurs et par la suite, Ekambi la met sur scène. De passage au Cameroun dans les années 1976, Ekambi Brillant crée son orchestre appelé Les Ebis (Ekambi Brillant Show) qui a en son sein des musiciens comme Lobé Valery, Aladji Touré etc. Cette même année, il prend la gérance d’une boîte de nuit, le Castel où se produisent Les Ebis qu’il fait venir en France. A la sortie de l’album Soul Castel, il abandonne le Castel et repart en tournée.

Il réussit à taper à l’œil de Slim Pezin, producteur de renom et guitariste de plusieurs artistes tels que Johnny Hallyday, Claude François, Michel Sardou, Mike Brant, Manu Dibango. En 1974, Ekambi Brillant rompt son contrat avec Phonogram et se lie à Slim Pezin avec qui il sort l’album Africa Oumba avec comme titre phare Elongui qui, par la suite, a été repris par plusieurs autres artistes dans le monde. Il s’agit par exemple de Demis Roussos qui a repris cette chanson sous le titre Kyrila et aussi Manu Dibango, pour ne citer que ceux-ci. L’album Africa Oumba enregistre un record d’environ 5 millions de ventes (Disque de diamant), numéro un aux hitparades dans plusieurs pays d’Afrique.

Il poursuit sa collaboration avec Slim Pezin comme producteur pour les titres Soul Castel (En 1976), Musunguédi (en 1977). Son titre Ayo Mba sorti en 1977 est diffusé par la radio Europe numéro 1 en France. C’était à une époque où les musiques africaines ne passaient pas encore dans les radios périphériques en France. Le titre connaît un grand succès et Ekambi Brillant enchaîne les tournées un peu partout.

Son label Jengou Records va produire de nombreux artistes parmi lesquels : Angélique Kidjo, Cella Stella, Esso Essomba etc. L’album Révérend sort en 1979 avec Muna Muto en titre phare qui sera repris avec brio par Bébé Manga. Son titre à succès Mussoloki a également été repris par plusieurs artistes parmi lesquels Annie Anzouer.

Au début des années 1990, Ekambi Brillant quitte la France et immigre aux Etats-Unis où il crée avec Vincent Nguini, le groupe Les Maloko Boys. Il s’installe en Californie et suit des études de cinéma et apprend les harmonies. Il retourne au Cameroun en 2000 et anime pendant quelques mois une émission de télévision à la CRTV (Cameroon Radio Télévision), le Super Ekambi Brillant Show.

En 2005, il est fait notable de la chefferie traditionnelle de Dibombari dans le Littoral. Il a été ennobli par le sultan roi des bamoun, sa majesté Ibrahim Mbombo Njoya qui lui a attribué le titre de notable. En 2007, il organise une grande exposition de ses tenues de scènes à l’hôtel Hilton de Yaoundé pour consacrer ses 36 ans de carrière. Son nom a même été associé à une chaussure de fabrication locale au Cameroun. Il a aussi présenté l’émission « Black Mic Mac Show » pendant plusieurs années.

En février 2009, il est élevé au titre d’Officier National de la Valeur à titre exceptionnel et en 2016 Commandeur de l’Ordre National de la Valeur.

Malade depuis quelque temps, il avait été évacué en Turquie. De retour au Cameroun, il suivait sa convalescence à Douala. Tout a basculé il y a quelques jours et il nous a quittés.
Je dresse sa vie et son parcours dans mon livre, « Les icônes de la musique Camerounaise ».

Arol KETCH

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