Une opération coordonnée par INTERPOL et AFRIPOL, menée entre juillet et septembre 2025 sous le nom d’«Opération Catalyst», a révélé l’ampleur d’un vaste réseau de fraudes aux cryptomonnaies touchant au moins 17 pays africains.
Les bilans publics diffusés par les partenaires internationaux parlent d’environ 83 arrestations et d’un montant significatif d’actifs illicites « repérés » : les communiqués mentionnent notamment 260 millions US $ identifiés dans des flux fiat/crypto, tandis que certaines enquêtes médiatiques estiment les pertes totales subies par les victimes à 562 millions US $ et plus de 100 000 personnes affectées.
Les enquêteurs ont aussi établi des liaisons entre des portefeuilles à haute valeur et des circuits de financement illicite, soulignant le rôle central des points de conversion (exchanges, services peer-to-peer, mixers) dans la transformation des gains frauduleux.
Le Cameroun apparaît parmi les pays affectés : des victimes camerounaises figurent dans les recensements régionaux et des adresses liées aux réseaux ont été identifiées par les enquêteurs, selon les reportages.
Face à la viralité de certaines vidéos et rumeurs, le ministère des Finances camerounais a publiquement « clarifié » et démenti des contenus mensongers, mais n’a jusqu’ici pas publié de bilan national détaillé (nombre de victimes locales, comptes saisis, procédures en cours) qui permettrait aux citoyens de comprendre l’ampleur réelle du préjudice sur le territoire.
Ce silence (ou cette opacité partielle) nourrit l’inquiétude et laisse les victimes sans relais public clair pour porter plainte ou espérer une restitution.
Ce qui frappe, et que révèle l’opération internationale, c’est moins la sophistication technique d’un nouveau crime que la faiblesse des maillons nationaux chargés d’y répondre.
Au Cameroun, comme dans plusieurs États africains, la réaction administrative oscille entre démentis médiatiques et communiqués lacunaires ; elle manque de procédures publiques, de guichets d’assistance aux victimes et d’une communication transparente sur les moyens techniques (analyses blockchain, coopération bancaire, gel d’avoirs) activés localement.
Pendant ce temps, les opérateurs privés (plateformes d’échange, fournisseurs d’analyses blockchain) jouent un rôle décisif dans le traçage : preuve que les autorités nationales doivent non seulement renforcer leurs capacités mais aussi encadrer légalement ces partenariats pour éviter qu’ils ne deviennent la seule frontière contre l’impunité.
Le Cameroun ne peut se contenter d’applaudir les opérations internationales et de publier des démentis ponctuels : il lui faut un plan d’action concret : transparence sur les enquêtes locales, hotline et soutien aux victimes, renforcement du cadre AML/CFT, formation d’une cellule spécialisée police-justice-régulateur, et obligations strictes pour les plateformes travaillant avec des comptes camerounais.
Sans cela, les annonces spectaculaires (arrestations à l’étranger, montants « repérés ») resteront des coups d’éclat qui laissent intacts les mécanismes permettant aux fraudeurs de convertir et d’extraire leurs gains. L’heure est à la responsabilité publique : protéger les citoyens et réclamer des comptes, pas seulement des communiqués.
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