BRUXELLES – Juste au moment où vous pensiez que la politique chinoise de l’Europe ne pouvait pas être plus désunie, les deux pays les plus puissants de l’Union européenne sont désormais également en désaccord sur l’opportunité de relancer un accord d’investissement moribond avec la superpuissance autoritaire.
Pour la France, ressusciter le soi-disant accord global sur l’investissement (CAI) UE-Chine est « moins urgent » et « tout simplement irréalisable », selon le président français Emmanuel Macron.
Pendant ce temps, le chancelier allemand Olaf Scholz est favorable à la « réactivation » de l’accord, qui a été bloqué peu de temps après son annonce fin 2020 après que Pékin a imposé des sanctions à plusieurs membres du Parlement européen pour avoir critiqué les violations des droits de l’homme.
S’adressant à POLITICO à bord de son avion présidentiel lors d’une visite en Chine au début du mois, Macron a déclaré que lui et le dirigeant chinois Xi Jinping avaient discuté du CAI, « mais juste un peu ».
« J’ai été très direct avec le président Xi, j’ai été très honnête, dans la mesure où il s’agit d’un processus européen – toutes les institutions doivent être impliquées, et il n’y a aucune chance de voir des progrès sur cet accord tant que nous aurons des membres de le Parlement européen sanctionné par la Chine », a déclaré Macron à POLITICO en anglais.
Pékin s’est avéré habile à empêcher l’UE de développer une politique chinoise unifiée, en utilisant des menaces allant d’éventuelles interdictions de vin français et espagnol à des avertissements selon lesquels la Chine achètera des Boeing américains au lieu d’Airbus français.
Le désaccord sur le CAI n’est qu’un autre exemple de divergence sur la politique chinoise en Europe, où Pékin a habilement courtisé divers pays et les a opposés les uns aux autres dans des jeux de division pour régner au cours de la dernière décennie.
Scholz demande le dégel du CAI
Après sept ans de négociations tortueuses, le CAI a été précipité par l’ancienne chancelière allemande Angela Merkel à la fin de la présidence tournante de six mois de l’Allemagne au Conseil de l’UE fin 2020.
Merkel a cherché à sceller l’accord et à se faire bien voir de Pékin avant que Washington ne puisse faire pression pour le bloquer, provoquant des tensions avec l’administration entrante du président américain Joe Biden.
L’Allemagne a longtemps été la principale pom-pom girl du CAI en raison de l’ampleur de ses investissements manufacturiers en Chine, en particulier dans les secteurs de l’automobile et de la chimie.
Le CAI aurait permis aux entreprises européennes d’investir un peu plus facilement en Chine et d’y protéger leur propriété intellectuelle. Mais les critiques ont dénoncé la faiblesse de la protection des travailleurs et se sont demandé dans quelle mesure elle pouvait…