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Import-substitution : le festival des promesses gouvernementales

Le pouvoir de Yaoundé dit avoir pris de nombreuses mesures pour augmenter la production locale. Des mesures cosmétiques et inefficaces, pensent les analystes.

Le gouvernement est résolument tourné vers l’implémentation de la politique d’import-substitution lancée depuis 2021. Le chef de l’État, Paul Biya l’a d’ailleurs fait remarquer lors de son adresse à la nation le 31 décembre 2021, alors que le déficit de production locale et de forte importation des produits a suffisamment déséquilibré la balance commerciale.

« Au demeurant, nous devons nous atteler à réduire nos importations et à accroître le volume de nos exportations en augmen- tant ta production locale, si nous voulons relever te défi de ta croissance », avait martelé Paul Biya qui rappelait au passage que la crise sanitaire liée au Covid-19 invite le pays à être au to-suffisant.

C’est donc tout naturellement que le gouvernement entend poursuivre de manière intensive sa politique d’import-substitution entamée en 2021. L’objectif étant, apprend-on, de donner aux producteurs locaux les marges de manœuvres nécessaires à une production locale massive, rentable et à la portée du consommateur. Les secteurs concernés sont l’agriculture, l’élevage, la santé humaine et animale, et la transformation locale du bois.

Pour ce faire, indique Louis Paul Motaze, il est prévu une exonération totale des droits et taxes de douane sur les serres destinées à l’agriculture, les semences végétales et animales améliorées, les vaccins pour la médecine humaine et animale, les médicaments à usage vétérinaire, les équipements, matériels et outils, non disponibles localement, utilisés dans le cadre de la « transformation plus poussée » du bois.

Par contre, souligne-t-on, certains biens importés dont l’offre locale est abondante et suffisante ou qui présentent des exter- nalités négatives seront taxés encore plus. Il s’agit notamment du thé, café, les fruits comestibles, le poivre, le piment, les pommes de terre, le miel, le beurre de cacao, les viandes et abats importés ainsi que le bois exporté sous forme de grumes.

« Il est certain que les mesures fiscales édictées par la nouvelle loi des finances auront, comme dans le passé, des conséquences sur le secteur extérieur à partir des importations pour lesquelles notre économie développe une certaine dépendance à quelques produits de grande consommation. Ces dispositions fiscales peuvent toutefois être contre-productives, en provoquant l’accroissement des pénuries, pénalisant ainsi de nombreux ménages. Par ailleurs, le durcissement de ce s conditions devrait accélérer l’urgence de la transformation de notre appareil de production, pour lui permettre de répondre efficacement à ta demande locale, plus largement communautaire, voire africaine », explique le Pr. Désiré Avom, économiste.

Instauration des droits d’accises sur les denrées

Signalons que depuis la loi de finances 2020, il est question d’implémenter des mécanismes visant à développer et encourager la transformation locale des produits du terroir. L’exonération des droits et taxes douaniers pour les équipements et intrants destinés à l’agriculture, à l’élevage, à la pêche et à l’industrie pharmaceutique est l’un de ces mécanismes.

L’instauration des droits d’accises sur les denrées qui peuvent être produites au Cameroun est également de mise. Tout comme sont attendues, des mesures de contingentement ou de restrictions sur les quantités de certains produits à importer, limitant ainsi les importations et la sortie des devises qui pourraient être affectées à l’industrie locale.

Surtout que le secteur privé, notamment dans le domaine de l’agro-industrie, se montre prêt à investir dans ce sens, une fois que les transformations nécessaires auront été opérées. Notamment la mise en branle du plan de relance de la production locale à grande échelle du riz, poisson, lait, blé, etc. produits qui contribuent à creuser le déficit de la balance commerciale.

Mesures spécifiques

C’est ainsi que dans la loi de finances encadrant le budget de l’exercice en cours, des mesures spécifiques ont été prises, principalement sur le plan de la fiscalité de porte. Elles portent pour l’essentiel sur le soutien aux secteurs prioritaires de l’agriculture, de l’élevage, de la santé humaine et animale ainsi qu’à la transformation locale poussée du bois.

Des mesures mentionnées dans l’article 5 de la loi de finances 2022, avec pour objectif d’infléchir le recours aux importations et renforcer l’offre agricole et sanitaire nationale ainsi que l’autosuffisance alimentaire et en produits de grande consommation.

Comme le soulignait encore le ministre des Finances à Garoua le 5 janvier dernier en lançant le budget, la politique d’import-substitution va se poursuivre de manière intensive cette année, en donnant aux producteurs locaux « les marges de manoeuvre nécessaires à une production locale massive, rentable et à la portée du consommateur », a précisé Louis Paul Motaze.

Dans un contexte où les prix des produits de grande consommation (denrées alimentaires de première nécessité, matériaux de construction, etc.) ne cessent de grimper, du fait des perturbations de la chaîne logistique et de la hausse des coûts du fret maritime, il est plus urgent de saisir le taureau par les cornes.

Le ministère de l’Elevage, des pêches et de l’industrie animale (Minepia), entend par exemple dans son programme 2022, doper la production laitière nationale, avec notamment, une nouvelle importation de génisses gestantes de race montbé- liarde et la mise en place de 26 exploitations laitières.

Dans le même sillage, le Minepia espère également un boom considérable de la production de viande et une revivification de l’industrie halieutique. Pour ce faire, il compte mettre en place des parentaux pour l’amélioration génétique porcine, ainsi qu’un programme d’animation pastorale afin de renforcer l’action d’accompagnement, l’encadrement et l’appui aux producteurs.

Orientations de la SND30

Pour les caudataires du régime de Yaoundé, le chef de l’État est plus qu’engagé à favoriser la production locale, qui soutiendra les conditions d’une croissance plus forte, durable, inclusive et génératrice d’emplois, notamment pour notre jeunesse. Cette vision du chef de l’État, pensent-ils, conforte les orientations de la Stratégie nationale de Développement sur la période 2020-2030 (SND30), dont la mise en œuvre des grands projets constitue la trame de fond.

Ce faisant, soutiennent-ils, le Cameroun a enregistré depuis quelques années une marge de progression de la croissance économique de son Produit intérieur brut (PIB) relativement ascendante. « Les mesures que nous avons prises nous permettent d’envisager avec optimisme une relance économique et un relèvement de notre taux de croissance à 4,2% en 2022, contre 3,6% en 2021 », espère d’ailleurs le chef de l’État.

Une projection optimiste qui dépend en grande partie d’un retour à une croissance mondiale positive, annoncée par les instances internationales. Le pouvoir de Yaoundé se réjouit d’ailleurs du comportement du Cameroun sur le marché financier international. Les réformes mises en œuvre en matière budgétaire, notamment dans les domaines fiscal et douanier, ont favorisé la réussite de l’opération de refinancement de l’Eurobond, ainsi que la conclusion d’un nouveau Programme économique et financier avec le Fonds monétaire international (Fmi).

Le Messager

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