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Hommage : Mama Nguéa Laroute devait célébrer son 60ème anniversaire ce 02 juillet 2020

La chanteuse camerounaise qui a rendu l’âme le 14 juin 2020 à Douala aurait célébré son 60ème anniversaire ce 02 juillet. Retour sur les pas d’une artiste qui a contribué au rayonnement de la musique camerounaise.

Si elle était encore de ce monde, Marna Nguéa Laroute aurait soufflé sur sa 60ème bougie ce jeudi 02 juillet 2020. Un anniversaire qui ne sera malheureusement pas célébré cette année. Elle qui ne manquait pas l’occasion de créer un évènement autour de cette journée s’est éteinte deux semaines plus tôt.

Quand elle décidait de célébrer son jour de naissance justement, Marna Nguéa réunissait alors des amis artistes et quelques membres de sa famille dans un hôtel ou à domicile. Véritable cordon bleu, elle s’occupait elle-même de la cuisine des différents mets et friandises. Un talent culinaire qu elle a hérité de sa mère.

Elle ne manquait surtout pas pendant ces moments de célébration, d’interpréter des chansons de son répertoire et de reprendre quelques titres de ses amis artistes. Du Nicole Mara y passait, mais aussi des titre du grand Ekambi Brillant. Aujourd’hui inscrite dans le livre des artistes de renom qui ont porté haut l’étendard de la chanson camerounaise, rien ne la prédestinait pourtant à une carrière dans la musique.

La petite Koubinom Louise voit le jour à Biakat par Yingui, dans le département du Nkam le 02 juillet 1960. Elle est la 4ème d’une fratrie de sept. La famille mène une vie très modeste. Le papa Walter Temb, agriculteur, décède tôt. La maman Koubissesse Maguy est ménagère. Fuyant la guerre du maquis, la maman quitte le Nkam et s’installe dans le département du Wouri à Douala.

La petite Louise est à peine âgée de quelques mois. Elle marque ses premiers pas au quartier Deïdo. Elle découvre ensuite le quartier Bonewonda à Akwa-Nord. Içi, elle va à l’école publique de Bonewonda, non loin de la maison. Puis, elle est inscrite à l’école privée laïque du même quartier, où elle obtient son Certificat d’étude primaire élémentaire (Cepe).

Louise Koubinom qui ne connait pas une enfance facile ne fait pas long feu dans les études. Après le primaire, elle se lance dans la coiffure et exerce pendant une année.

Makossa zingué

Elle est âgée de 20 ans environ lorsque son frère ainé Ebeni Abel lui tient la main et l’amène dans les rangs de la chorale Makon m’esese de l’Union des églises baptistes du Cameroun (Uebc), paroisse de Bonamouang (Akwa-Nord). Lors d’une répétition, la voix de la jeune Louise se démarque des autres choristes. Bile Bekombo Isaac, le maitre de chant de l’époque, lui demande de chanter le solo. Elle l’exécute avec brio. « Quand elle a fini de chanter le solo, c’est tout le monde qui a applaudit. Elle est devenue la soliste de la chorale. Elle part de là pour le Show Business», se souvient Ebeni Abel, un sourire nostalgique aux lèvres.

La jeune fille qui se voyait gagner sa vie plus tard dans la couture ou la coiffure commence alors à écrire des morceaux. Son frère cadet, Ferdinand Din Din, alias Papillon, l’épaule. Il lui fait enregistrer son premier album en 1991. Il est intitulé « Fou malade ». La chanson est bien accueillie par les mélomanes. Mama Nguéa est elle-même surprise par le succès. Elle tient le bon bout et ne lâche pas prise. Elle enchaîne avec d’autres titres à succès.

Entre 91 et 2000, l’artiste est à la Une dans les Play-liste de radio, sur les podiums de grands évènements. Ses chansons sont sollicitées pour animer les tours d’honneur pendant les célébrations de mariage. « Chauffer Moteur », « Bossinga », « Soleil de décembre », « Ebonga Longa » sont entre autres quelques titres à succès de sa dizaine d’albums. L’artiste s’engage aussi dans plusieurs collaborations musicales avec d’autres confrères.

Mais son style à elle est bien identifiable dès la première écoute. Dans chacune de ses productions, on retrouve du makossa assaisonné de zouk et amélioré plus tard avec la création du rythme « Makossa zingué ». Il y a une bonne dose de lyrisme saupoudrée de mélancolie dans les textes. L’amour et les relations entre les hommes sont au centre des chansons reprises en français, en duala et en banen. «Elle chantait très bien. Pour moi, elle fait partie des cinq femmes camerounaises qui chantent bien lé makossa.

Elle était méchante sur scène. Dans mon bar, j’ai presque toutes ses chansons», fait savoir l’artiste Toucouleur. Il se souvient que lorsqu il est sorti de I hôpital il y a quatre ans, il était très bien accueilli dans le cabaret de Marna Nguea, Toss Mandjara au quartier Akwa-Nord. « Après ma maladie, j’y allais manger, chanter. Elle me disait courage. Elle encadrait beaucoup ».

Après quelques années à perfectionner son art au Cameroun, les tournées internationales frappent à la porte. L’artiste transporte sa musique à travers les pays du monde. Elle se rend aux Etats-Unis, en France, en Belgique, dans plusieurs pays d’Europe et d’Afrique. Les sollicitations pour des concerts à I étranger s’enchaînent. Les récompenses aussi.

Marna Nguéa Laroute est sous le feu des projecteurs. Un soir, elle doit prester dans un milieu huppé au quartier Akwa. Les footballeurs Eric Djemba Djemba (un membre de la famille de Marna Nguea du côté paternel, ndlr) et Samuel Eto o s y retrouvent aussi. Djemba Djemba fait les présentations. La chanson en hommage sur Samuel Eto o suit. La Star du football est flatté. Il lui offre une enveloppe. Une relation fraternelle nait entre les deux. Ils se rencontrent quelques fois.

Glamour

Mais d’où lui vient son nom d’artiste ? Des proches font savoir que ènom (de Koubinom) signifie la route en langue Banen. Traduit en duala, on obtient Nguéa. D’où le nom Nguea Laroute. Un nom qui a très vite rimé avec « Nyanga ». Toujours bien mise, Marna Nguéa Laroute apparaissait toujours sur la scène avec quelques artifices de beauté. Pédicure et manucure au point, Make up bien en place, vêtements assortis. Ce côté nyanga , elle ne l’a pas adopté seulement une fois devenue célèbre. Selon ses proches, l’artiste est amoureuse de la mode depuis son bas âge. « Elle aimait le nyanga.

Elle prenait du temps pour sa beauté. Elle s’habillait très chic depuis le bas-âge », rapporte Ebeni Abel, son frère. Ses danseuses témoignent aussi de ce que la Marna aimait à les voir sous de beaux jours, bien mises. « Elle disait qu il faut être glamour. Elle était toujours bien habillée et présentable», indique Mercedes Compressor, une de ses danseuses. Les filles qui I accompagnaient sur le podium reconnaissent qu il fallait être dur de caractère et connaitre I artiste pour travailler avec elle. Elle qui voulait toujours le travail bien fait.

« Elle ne voulait pas de rature. Donc du coup, il y a des moments où, lorsqu’on faisait un spectacle et qu il y avait des couacs, elle nous grondait. Elle disait souvent je ne veux plus de vous. Je vais vous changer. Elle nous met ensuite en Stand-by même pendant une semaine ou deux. Après elle nous rappelle et nous dit que nous sommes ses enfants. Elle n’était pas rancunière », se souvient Ida Odile Ndengue, une des danseuses. Mais les proches sont unanimes. Loin de la scène, Marna Nguéa était serviable, généreuse.

Un peu difficile de la contrôler quand elle piquait une colère, mais elle revenait très vite à de bons sentiments et ne gardait pas de rancunes. « Elle ne mâchait pas ses mots. Quand il y avait des problèmes dans la famille, elle était très dynamique », témoigne Samuel Temb, son autre frère ainé.

Côté sentimentale, l’artiste est revenue d’un de ses voyages ‘ aux Etats-Unis en 2017, un anneau à l’annulaire de la main gauche. A ses proches, elle a indiqué qu elle s’était mariée dans I Oklahoma avec un américain. La famille de l’artiste n a jusqu ici pas rencontré I heureux élu. Même si elle n’a pas eu d’enfant biologique au cours de sa vie, Marna Nguéa avait un plaisir à prendre d’autres enfants comme les siens. C’est le cas avec Monique Djambon, la dame de ménage qui vivait avec elle pendant sa maladie, jusqu à ses derniers moments.

Elle I appelait « sa fille ». En plus de ses frères et soeurs, Monique était près du chevet de maladie de I artiste. Une maladie qui a commencé à se dégrader avec l’amputation de la première jambe en octobre 2019. La jambe a été amputée à la clinique Idimed à Douala. Suite à quelques complications post opératoires, l’artiste a ensuite été prise en charge par l’hôpital Laquintinie de Douala.

Tout est fini

Sous la houlette de la marraine Nicole Mara, les artistes de différentes variétés se sont aussitôt mobilisés pour que Marna Nguéa puisse recouvrer la santé. Un concert caritatif est organisé à la Chaumière à Bo-nanjo le 02 décembre 2019. Les artistes interprètent des titres du répertoire de Nguéa Laroute et des chansons qui célèbrent la vie. On retrouve dans le casting, I ancienne génération avec des noms bien connus comme Toto Guillaume, Ben Decca.

Il y a aussi des plus jeunes tels Hobs-cur, Franko ou Gaëlle Wondje. Les fonds à collecter sont destinés à supporter les soins médicaux de Marna Nguéa, qui se montre très forte sur son lit de maladie à Laquintinie. Elle est d’ailleurs la première â réconforté les visiteurs qui se rendent à son chevet. Couchée, elle pense déjà à la sortie d’un autre album à ce moment-là, apprend-on. « On ne chante pas avec les pieds », disait-elle.

Mais entretemps, les choses ne s’arrangent pas pour l’auteure de « Soleil de décembre » qui souffre aussi de diabète et de problèmes cardiaques. Le 16 janvier 2020, la deuxième jambe de Marna Nguéa est amputée à I hôpital Général. Elle suit les pansements à domicile au quartier Kotto, lieu-dit Entrée chefferie. Ses plaies cicatrisent bien. Elle n’est pour autant pas sortie de I auberge. Mal en point, elle est reconduite à I hôpital Général de Douala début juin. Elle y passe un scanner. Elle est ensuite transportée à I hôpital de la Garnison militaire à Bonanjo, où elle est internée pendant une semaine.

« Elle est entrée dans le coma, mais deux jours après elle s’est rétablie. Elle s’est mise à manger et à reconnaître les gens. Elle est rentrée à la maison. Deux jours après elle replonge dans le coma qui l’amène jusqu à ce jour (14 juin 2020, ndlr), où elle est décédée », raconte son frère Ebeni, émue. Tout s’est donc arrêté sous le soleil du dimanche 14 juin 2020 à 10h. Marna Nguéa prendra la route pour la dernière fois le 11 juillet 2020 pour Tonde Carrefour, où elle sera inhumée. Tout est fini… A présent elle peut s’en aller…

Source : Le Jour

 

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