Le budget de l’État du Cameroun pour l’exercice 2024, équilibré entre recettes et dépenses à la somme de 6 740 milliards de Fcfa, suscite des inquiétudes quant à son exécution dans un contexte marqué par des risques budgétaires majeurs. Le lancement officiel du projet a eu lieu à Maroua, dans la région de l’Extrême-Nord, le 16 janvier 2024, par le ministre des Finances, Louis Paul Motaze.
Malgré une hausse des ressources propres et des dons de 8,5% (5 190,1 milliards de Fcfa), le budget fait face à plusieurs défis qui pourraient compromettre sa réalisation.
**1. Dépréciation de l’Euro face au Dollar :**
La poursuite de la dépréciation de l’euro par rapport au dollar constitue l’un des principaux facteurs contingents. Cette dépréciation entraîne un surenchérissement du service de la dette extérieure et des importations, avec le portefeuille de la dette extérieure composé en grande partie d’euros (39%) et de dollars américains (28,3%).
L’économiste camerounais Célestin Monga souligne que l’euro a perdu 19% de sa valeur face au dollar en un an, entraînant une augmentation mécanique des revenus d’exportations mais alourdissant la dette externe et les importations.
**2. Niveau des Subventions des Carburants :**
Un autre risque majeur concerne le niveau des subventions aux prix des carburants. Le président Paul Biya a annoncé une baisse des subventions, passant de 1 000 milliards de Fcfa en 2022 à 640 milliards de Fcfa en 2023 (-36%). Une nouvelle révision de ces subventions pourrait entraîner une hausse des prix à la pompe, mais la valeur de cet ajustement demeure incertaine, ajoutant un élément d’instabilité au contexte actuel.
**3. Tensions Inflationnistes des Matières Premières :**
Le Cameroun est vulnérable aux tensions inflationnistes des cours des matières premières. Les inquiétudes persistent sur le marché des matières premières, qui a connu une période d’instabilité jusqu’à fin 2022. Le rapport Cyclope 2023 indique que les perspectives pour certaines matières premières à partir de 2024 sont sombres, pouvant entraîner une augmentation des dépenses d’importations.
**4. Appuis Budgétaires et Dette Flottante :**
Les besoins de financement du budget en 2024 s’élèvent à 1 577,7 milliards de Fcfa, mais le pays n’est pas certain de mobiliser tous ces fonds, en particulier les prêts-projets prévus à 907,2 milliards de Fcfa. La dette flottante représente également un risque certain pour la stabilité des finances publiques, avec des impayés de l’État s’élevant à 152 milliards de Fcfa en 2019.
Le gouvernement ne néglige pas les risques liés aux passifs du portefeuille des partenariats public-privé, ainsi que les facteurs internes et externes aux Collectivités territoriales décentralisées (CTD) et aux entreprises publiques cumulant des pertes au fil des ans.
Dans ce contexte d’incertitudes, la gestion prudente des finances publiques et la surveillance attentive des risques sont impératives pour assurer la stabilité économique du pays.