Les débats télévisés au Cameroun : entre connivences et manque d’expertise

Les débats télévisés sont devenus des rendez-vous incontournables dans l’agenda médiatique du week-end au Cameroun. Cependant, malgré leur volonté légitime de favoriser la contradiction et de donner la parole au public sur des sujets d’intérêt général, ces émissions sont souvent minées par des connivences entre les journalistes, les hommes politiques et les acteurs sociaux.

La télévision est un puissant vecteur d’influence et de pouvoir, et certains acteurs l’ont bien compris. Ainsi, depuis au moins 2011, nous avons pu observer la présence quasi systématique d’un haut cadre du ministère de la Communication sur certains plateaux de débats télévisés, que ce soit à titre personnel ou officiel. Il est important de rappeler que le ministre de la Communication est le Porte-Parole du gouvernement de la République. Cette présence régulière soulève des questions quant à l’objectivité et à l’indépendance de ces débats.

Une analyse des acteurs invités sur ces plateaux révèle la prédominance des hommes politiques, tant du pouvoir que de l’opposition, et des hommes de médias. Les choix des invités dépendent d’une part de la relation entre le promoteur du média et les acteurs politiques, et d’autre part des relations particulières que les journalistes entretiennent non seulement avec les acteurs sociaux, mais aussi avec la hiérarchie du média.

Sur le plateau, certains journalistes veillent à l’équilibre des débats en respectant le principe du contradictoire et en accordant un temps de parole équitable à chaque participant. Cependant, il est également constaté que certains hommes de médias, initialement présentés comme consultants, ont du mal à prendre du recul dans les débats et finissent par adopter des positions militantes. Cette tendance peut nuire à la qualité et à l’objectivité des échanges.

En coulisses, la sélection des invités est souvent influencée par la relation qu’un acteur social entretient avec l’animateur du débat ou avec le dirigeant du média. La liste des participants est validée en haut lieu, en fonction des affinités politiques du patron du média, et elle s’impose ensuite au journaliste. Cette pratique peut limiter la diversité des points de vue et favoriser les connivences.

Il est également important de souligner le manque d’experts sur ces plateaux de débats télévisés. En effet, la tendance est de privilégier des acteurs au profil sulfureux et politiquement marqué, dans le but de séduire une audience attirée par le populisme. Cependant, cette approche conduit malheureusement à de nombreux dérapages et sanctions, qui affectent la crédibilité des médias.