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L’âme camerounaise de Manu Dibango

La parution de cet album (lui aussi exceptionnel, mais méconnu), en 2002 sous le label de cette époque, JPS, marquait à la fois l’extension et la clôture d’une séquence de « retour au pays », que le Vieux Manu avait initiée quelques années plus tôt avec le grandiose « Mboa Su » (1998).

En effet, par une série de trois albums, Manu avait décidé de faire le chemin de retour vers le pays, en revenant à une signature sonore, orchestrale et musicale plus « camerounaise », plus roots, plus authentique, moins mondialisée et davantage « makossa », pour reprendre pied dans une maison (le Cameroun) et un public (les Camerounais) qu’il se sentait un peu coupable d’avoir abandonné par ses longues années de voltige dans les eaux de l’internationalisme musical et humain.

Pas la peine de m’étendre sur l’ouverture du jeu, « Mboa Su » dont le succès populaire fut, à mon sens, démesurément investi sur le duo époustouflant avec Douleur, alors que dans le restant des neuf titres, se cachaient de véritables trésors auditifs.

Par la suite, vint « Kamer feeling » (2000) qui fut loin de remporter le succès commercial qu’il méritait pourtant largement, avec là encore, une atmosphère sonore délibérément tournée vers les saveurs du pays. Ici, l’empreinte de Noël Ekwabi était totale, puisque le gros des chansons restitue une basse orgasmique qui allait aussi signer comme un testament pour cet autre génie de la musique, éternel compagnon de scène et de studio, mort une dizaine d’années plus tard, à Paris, lui aussi, d’un atroce cancer.

C’est ainsi que, deux ans plus tard, arriva « Kamer All Star » qui se trouve encore aisément en commerce (Mc Pop, à Yaoundé) et que je conseille à toute personne sérieuse d’acheter. Construit autour des quelques légendes du makossa et des musiques affinaitaires, il redonne à s’approprier Manu Dibango avec une texture qui sublime toutes les mesures et tous les superlatifs. Album méconnu, album perdu dans l’ignorance du grand nombre.

Album qui nous donne aujourd’hui encore, en cette date d’insondable tragédie, de revire Manu Dibango, comme l’expérience d’une sorte de pied de nez au divin. « Kamer All Star » devait être le premier d’une longue série de trois, tous portés par le Vieux et tous hébergés chez JPS.

Personne sait réellement ce qui a interrompu cette longue marche dont l’horizon imaginé nous reste aujourd’hui comme un puissant testament d’une âme qui s’est entièrement donnée pour esquisser avec un souffle indéfinissable l’étendue du monde et des tragédies qui, en ces heures sombres, nous suggèrent de nous engager pleinement au beau et à l’amour.

Par Serge Alain Godong

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