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Coronavirus : les imprimeries à l’agonie

L’arrivée de la pandémie a donné le coup de grâce à cette activité qui était déjà au bord du précipice.

Imprimerie Saint Augustin, vendredi 08 mai. Seul deux employés sont présents sur la dizaine que compte l’entreprise. Le promoteur, Marc Réné Tchuitcheu joint au téléphone la veille nous fera comprendre qu’il est à la maison. « Je ne sors plus tous les jours parce que l’activité est au ralenti », ex-pose-t-il.

Rencontré à son bureau le lendemain, il peint la situation : «je me suis rendu au travail ce jour parce que j’avais des rendez-vous. On vit des recouvrements. J’attendais un peu’ d’argent pour appeler le personnel et le dispatcher mais, malheureusement, je n’ai rien obtenu. Partout où des prestations ont été livrées, on nous répond qu’il n y a pas d’activité ».

Il explique par la suite avoir fait le.choix de ne pas licencier ou mettre son personnel en congé technique. « Au début de la crise, le travail a été réorganisé de telle sorte que chaque employé avait deux à trois jours par semaine ». Une alternative difficile à respecter à cause de l’absence de commandes.

Antoine Djomo, promoteur de Mad communication, imprimerie spécialisée dans l’offset et le numérique a mis 25 de ses collaborateurs en congé technique après deux semaines d’inactivité. « En offset, seul un employé est resté pour pouvoir réaliser les travaux s’il y en a. En réalité, le personnel restant garde les portes ouvertes. En un mois et demi, je n’ai pu rappeler aucun pour réaliser un travail. », confie-t-il.

Durant tout le mois d’avril, le manque de commandes a contraint l’entreprise Chris-ink sari a fermé ses portes. Avec la survenue de crise sanitaire, elle fonctionne au rabais. Le directeur général, Jean-Marie Tiobou a réduit son personnel. Le nombre d’employés est passé de 7 à 3.

Le même impératif s’est imposé à Younous Paraiso. Le directeur de la papeterie Paraiso basé à Douala n’a pas eu d’autre choix que de diminuer son effectif. « Nous sommes une entreprise à forte main d’œuvre. Avec moins de commandes, on a gardé le minimum. On a payé les salaires pour le départ en congé technique », regrette le chef d’entreprise.

Un secteur moribond avant la Covid 19

Selon l’institut national de la statistique (Ins), le secteur de l’imprimerie représentait une enveloppe de près de 83 milliards de Fcfa en 2018. Cet argent profitait pour l’essentiel aux économies étrangères qui imprimaient à moindre coût les cahiers, livres et autres. En 2020, aucune imprimerie camerounaise n’avait 30% de taux d’activité.

Ce qui représentait un manque à gagner de près de 60 milliards de Fcfa pour le secteur. Chaque unité de production de ce secteur compte entre 6 et 20 employés permanents et entre 2 à 10 temporaires utilisés à la tâche. Les acteurs du domaine relèvent les difficultés auxquelles ils étaient confrontés. Antoine Djomo sous la casquette de responsable syndical de la zone

Littoral/Sud-ouest indique qu’avant la crise environ 20% avaient déjà mis la clé sous le paillasson à cause du manque des commandes. « La pandémie est venue trouver un secteur de l’imprimerie dans la tourmente du fait de la dématérialisation avec les smartphones, android. Les produits ont pris la place du papier et du support matériel que ce soit dans l’imprimerie », souligne Younous Paraiso.

Pour le directeur général de Chris-ink sari, « la lutte contre Boko haram et la guerre dans les régions anglophones ont froissé le développement de plusieurs entreprises, amenant conséquemment celles du secteur de l’imprimerie à subir fautes de manque de bon de commande de prestations qui constitue leur principale activité ».

La difficulté d’accès au financement, le manque de protection institutionnelle ainsi que la concurrence déloyale de certains cadres de l’administration possédant des structures sont aussi présentés comme des goulots d’étranglement du secteur de l’imprimerie.

La survenue de la Covid-19 au mois de mars 2020 a causé le désarroi des chefs d’entreprise, ceux du secteur de l’imprimerie en particulier. « C’est une période où l’économie industrielle prend son virage. La plupart des entreprises ont déjà bouclé leur bilan et préparent les budgets pour les mettre en exécution. Les entreprises lancent des appels d’offre notamment les fournitures de bureau pour toute l’année pour ce qui est de notre domaine.

Sur le plan scolaire, c’est l’amorce du 3ème trimestre avec la préparation des examens et matériels didactiques pour préparer les examens officiels dans les deux sous sections. Nous sommes sollicités pour ce matériel. C’est dans ce contexte que le covid-19 a surgi, frappant ainsi de plein fouet l’activité de l’imprimerie, papeterie avec tous les métiers connexes qui peuvent déjà avoir la tendance de leur chiffre d’affaire annuel à partir de cette période de mars. Nous répondons aux appels d’offres et le dépouillement sont faits en avril et les commandes sont passées », déplore Younouss Paraiso dont la structure est spécialisée dans la production des enveloppes et des articles issus de la transformation du papier.

« Avant la pandémie, je travaillais sur un projet d’une organisation touristique. Projet relatif à l’organisation du Chan. Celui-ci a été annulé. Imaginez que nous étions en phase terminale sur les créations et il ne manquait plus qu’à valider afin que nous lançions la commande », se rappelle Jean-Marie Tiobou

70% des employés en chômage

Selon l étal des lieux dressé par le syndicat national des employeurs de l’industrie d’arts po-lygraphiques et activités connexes du Cameroun(Sy-neiapac), les entreprises de ce secteur connaissent une baisse drastique du chiffre d’affaire des unités de production d’environ 80%. Cette baisse est en grande partie causée par la fermeture des écoles. Pratiquement 90% des outils utilisés par les élèves et étudiants sont exclusivement des produits de l’imprimerie. La mise au chômage technique des employés quant à elle s’élèverait à 70%.

L’annulation de la célébration de la fête du travail et de la fête nationale est venue donner un coup de grâce. « Des commandes ont été.annulées. Certaines étaient déjà lancées, le matériel commandé, les crédits bancaires contractés. Personnellement, j’ai eu des commandes au niveau de l’imprimerie qui ont été mis en « stand-by ». Une structure qui avait passé une commande de 6 millions et qui m’a demandé de garder parce qu’elle était en confinement. L e coût du travail et les intérêts bancaires m’incombent », témoigne Antoine Djomo.

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