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CAN 2021 – Yves Tchamadeu : « le sélectionneur doit éviter de surfer sur l’instabilité à l’axe de la défense»

Consultant sportif parmi les plus aguerris au Cameroun, il passe au scanner le parcours, les performances des Lions indomptables et les choix tactiques du coach lors de la phase des poules. Mieux, il se projette dans la préparation des huitièmes de finales prévues lundi prochain au stade d’OIembé.

Les Lions ont réussi à terminer leader de leur poule avec 7 points en trois matchs. Est-ce en soit un ascendant psychologique pour la suite de la compétition ?

Oui tout à fait ! C’en est un. Quand on finit leader de sa poule dans une compétition en tant que pays hôte et la pression que tout cela comporte, c’est toujours un plaisir et un réconfort sur le plan mental puisque cela permet de se requinquer pour mieux aborder la suite de la compétition.

C’est vrai que le match nul enregistré lundi dernier lors du dernier match de poule face au Cap-Vert, peut créer des remises en question. Mais,à bien regarder, c’est toujours bien de se remettre en question afin de réajuster et de parfaire les manquements pour la suite du tournoi.

Etes-vous de l’avis de ceux qui estiment que le Cameroun gagne sans être convaincant dans son jeu ?

C’est vrai qu’aujourd’hui, allier spectacle et efficacité en football reste un exercice ultra difficile. De nos jours, c’est la culture de la gagne et de l’efficacité qui compte, car à l’heure du bilan, c’est l’aspect des résultats et le titre final qui seront des éléments d’analyses pour faire une synthèse.

La France n’était pas championne du monde parce qu’elle produisait le meilleur football ; le Cameroun en 2000 ne produisait pas ce meilleur jeu dont on est intransigeant vis à vis du staff. Le mental et le fi thing spirit ont toujours été des identités remarquables de notre sélection. Le seul bémol pour moi reste quand même cette défense hésitante et perplexe à la fois dans son rendu mais aussi dans l’instabilité des hommes utilisés (c’est le compartiment le plus stable dans une équipe de football Ndlr).

Est-ce que notre équipe nationale est sur une bonne dynamique quand on sait que les trois matchs de poule ont chacun connu des fortunes diverses ?

Je pense que oui. Nous sommes dans une bonne dynamique. Vous savez, en football, il y’a des éléments d’analyses, malgré le fait qu’on aspire toujours à une perfection globale sur la performance de l’équipe. Vous avez une équipe qui à chaque fois quelle a joué, a réussi à marquer. Du coup, on a la meilleure attaque de la compétition avec 7 buts inscrits. Cerise sur le gâteau, le meilleur buteur, Vincent Aboubakar (5buts) est camerounais.

Le fait d’avoir des Onze entrants différents transpire aussi de l’incertitude du coach vis à vis de son groupe. Ce qui n’est pas de bon augure sur le plan de la gestion du collectif qui plus est, dans l’axe de la défense, s’est vu aligner trois axes en trois matchs. Le fait pour cette équipe de prendre au moins un but à chaque match, peut en être une conséquence aussi. Aujourd’hui, nous sommes qualifiés certes, mais reconnaissons un caractère assez fébrile de notre défense. Surtout au niveau de son alignement et de son positionnement dans les ballons de vitesse en profondeur.

Qu’est-ce qui peut justement expliquer ce manque d’assurance et de sécurité dans notre défense jugée très poreuse?

C’est non seulement un manque d’assurance, mais aussi un problème de gestion de groupe des joueurs de ce secteur. Même le milieu de terrain n’est pas en reste puisqu’on a eu deux constitutions de milieu différent en trois matchs (Zambo, Oum et Kunde pour le premier et le troisième) ; (Zambo, Ongla et Choupo lors du deuxième match). Du coup, le coach devrait pour les huitièmes de finale, être responsable et décisif en assumant ses choix et éviter de surfer sur des tâtonnements comme il en a fait preuve jusqu’ici.

Dans toutes les équipes du monde, même si on met en avant, l’avantage concurrentiel, il existe des hiérarchies à tous les postes. Ce qui veut dire que même entre eux les joueurs, ils savent comment on peut se dessiner leur Onze entrant. Ce qui n’est pas le cas pour les Lions. Et au regard de la particularité du second tour (élimination directe Ndlr) il faudra faire gaffe pour éviter des surprises désagréables.

Quelle analyse faites-vous du jeu de Nohou Tolo sur le flanc droit de la défense ? Beaucoup de camerounais le découvrent à cette Can et en gardent une belle impression. Vous aussi ?

Je pense qu’il se positionne aujourd’hui comme la véritable révélation pas seulement des Lions, mais de cette Can. Du moins jusqu’à ce premier tour, c’est un jeune que beaucoup découvrent. Pourtant, il a fait toutes ses classes dans les catégories inférieures du Cameroun (des Cadets aux Espoirs) et il faut signaler que sous l’ère Hugo Broos en 2017, il avait été titularisé avec les Lions lors d’un match éliminatoire de Coupe du monde 2018 face à la Zambie.

C’est vous dire que c’est un jeune qui est dans l’antichambre depuis bien longtemps et attendait simplement que son heure sonne. Il est resté égal à lui- même dans cette compétition .Pour ceux qui le connaissent, c’est un joueur qui met beaucoup de cœur quand il joue et au- delà du talent de football qu’il a, il a réussi à associer volonté, dynamisme et engagement depuis le début de cette Can.

Je crois qu’il a compris que si on veut aller loin, on s’en donne des prédispositions. Pour ma part, ce qu’il démontre en termes d’état d’esprit, c’est la marque du joueur depuis fort longtemps. Je l’ai vu depuis son passage dans notre championnat d’élite avec Botafogo de Douala.

On reproche à Zambo Anguissa et à André On an a, une espèce de suffisance, de trop plein d’assurance dans le jeu. Trouvez-vous ces remarques un peu dures ?

Je pense que chacun peut donner son avis sur l’attitude des hommes qu’ils sont mais je pense que c’est un style qui leur est propre et ils réussissent à s’imposer au sommet de l’Europe en club. Je pense aussi qu’il est important pour eux de prendre ces remarques du public en considération et se dire que l’équipe nationale, c’est aussi ça.

Avoir la pression et voir tous les détails de son jeu passés au scanner par les supporters. Zambo Anguissa est un leader, il a besoin malgré son caractère, de s’appliquer. Quant à André Onana, on sait tous qu’il joue gros dans cette Can au regard des attentes qui pèsent sur ses épaules et les critiques des camerounais qui le suivent et l’adulent en club. Mais je pense jusqu’ici, qu’il fait sa Can.

Il sort de 9 mois sans compétition mais aussi d’un match époustouflant face à la Côte d’ivoire en éliminatoire de la Coupe du monde. Maintenant, le coach est bien placé pour avoir une idée réelle sur cet aspect d’analyse et en tirer des conclusions. Mais pour ma part, ce sont des joueurs dont nous avons grandement besoin au vu de leur niveau et de toute la confiance qu’on leur porte.

Vincent Aboubakar vient d’égaler le record de Samuel Eto’o, en inscrivant 5 buts en une phase finale de Can. Est-il bien parti pour terminer soulier d’or de ce tournoi ?

Je pense que oui. Il est en état de grâce dans cette compétition non seulement en dehors des buts marqués mais aussi sa capacité à cadrer pratiquement toutes ses frappes à chaque match. Il a manqué la Can 2019 en Egypte ; il a certainement hâte de se rattraper puisqu’il est le leader, le capitaine de cette équipe où le jeu collectif et la cohésion entre les joueurs constituent un sérieux argument. Comme le dit le vieil adage, c’est quand la mangue est mûre qu’on la consomme.

Quelle peut être la formule miracle du sélectionneur pour franchir l’étape des huitièmes de finales ? Lui qui a pour habitude de changer le dispositif tactique et même les hommes chargés de l’implémenter sur le terrain.

La formule est déjà simple : éviter de continuer dans cette formule instable dans ces choix. Car aujourd’hui on ne peut dire avec exactitude quel axe central pourra jouer les huitièmes. Or, dans un groupe, il est toujours important d’avoir des certitudes à certains postes. Sur un match il faut qu’on ait une équipe aussi entreprenante qui peut continuer à concrétiser les occasions quelle se procure en restant concentrée sur toute la rencontre et surtout plus concentrée sur le plan défensif. Le niveau sera autre dès ce second tour et la moindre erreur sera fatale. Le sélectionneur est prévenu.

Comment trouvez-vous le niveau des équipes à cette compétition ?

Très bon niveau surtout pour les outsiders. Par contre, les favoris comme la Côte d’ivoire, l’Algérie, l’Égypte, le Ghana, tardent encore à justifier leur salut. Peut- être sont-ils encore en quête de repères. Pour moi, la performance des jeunes équipes ou des équipes outsiders donne un arôme particulier à cette Can et relève le niveau de la compétition. Ce qui explique ce nivellement de valeurs dont on parle dans le football.

En dehors du pays hôte qui a de solides arguments de remporter la compétition, quelle autre nation à cette Can voyez-vous comme sérieux prétendant au titre ?

C’est une question difficile à répondre au vu du contexte de cette compétition mais aussi de la performance décevante de certaines sélections. Mais humblement, je pense que le Nigeria crève l’écran dans son rendu. Le second tour pourra nous dévoiler un retournement de situation de certaines équipes comme l’Algérie ou encore l’Égypte si ces derniers passent ce premier tour.

Vous savez, la dernière équipe inattendue et outsider à avoir remporté une Can, était la Zambie en 2012, ce qui veut dire qu’à la fin, malgré le comportement des challengers, une équipe favorite sur le papier ou à travers son passif dans la compétition, a toujours remporté la Can si on s’en tient au dix dernières éditions.

Du coup, on pourra peut-être assister à une surprise au Cameroun. Mais les statistiques me laissent perplexe sur la question. Personnellement, mon coup de cœur dans cette compétition reste le Mali.

Le Messager

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